CHARLES DE ROHAN (1715-1787)

PRINCE DE SOUBISE, SEIGNEUR DU BIEZ À WIERS

par Raymond V.M. Bulion

 

 

Avant-propos

Cet article se décomposera en trois parties :

1.    Biographie de Charles de Rohan

2.      Archives de la famille de Rohan (Papiers, documents concernant Charles de Rohan et Wiers) et publication avec analyse d'une correspondance originale de Charles de Rohan  destinée à Monsieur Depré[1]. Dans cette lettre le seigneur du Biez écrit : "l'avantage que nous avons remporté en Canada mettra les Anglois de mauvaise humeur".

3.      Charles de Rohan et son temps (La guerre de Sept Ans en Amérique du Nord 1756-63, le combat du Fort Necessity le 3 juillet 1754, les batailles de Monongahéla (9 juillet 1755), de Carillon (8 juillet 1758) et des Cardinaux (20 novembre 1759) - Notices biographiques.

 

Les principales références bibliographiques de base utilisées pour écrire cette biographie sont : 

- Georges Martin. - Histoire et généalogie de la Maison de Rohan, de Chabot et de Rohan Chabot. La Ricamarie, chez l'auteur, 1977. 2 vol.[2]

- l'excellent instrument de travail fort rare de M. Pinard Chronologie historique-militaire, contenant la création de toutes les charges militaires, Paris, Claude Hérissant, 1760-78, 8 vol. 

- l'ouvrage de Michel Antoine, éminent spécialiste de l'histoire de l'État sous l'Ancien Régime, Le gouvernement et l'administration sous le règne de Louis XV. Dictionnaire biographique, Paris, C.N.R.S., 1978. Ouvrage couronné par l'Académie des Sciences morales et politiques.

 

J'ai estimé qu'il était important de donner le plus de détails possible concernant la guerre de Sept Ans en Amérique du Nord, ainsi que sur certains personnages qui ont gravité et joué un rôle capital autour du seigneur du Biez. Il m'a paru très important de montrer le contexte historique local et surtout international dans lequel le prince de Soubise vivait, participait,  fut régulièrement mêlé et donc connaissait fort bien. Partie de prime abord assez aride, mais ô combien précieuse pour comprendre Fontenoy et l'après Fontenoy. Celui-ci était n’oublions pas, ministre d'État et l'un des plus proches confidents de Louis XV. De plus, le lecteur attentif découvrira que la plupart des acteurs et des événements politiques sont reliés, s'enchaînent. Certaines informations, sensibles, peu connues, proviennent en partie de l'exploitation de l'impressionnante et riche bibliographie générale des tomes III et IV (fin de volume) du Dictionnaire biographique du Canada.

Durant la gigantesque déflagration de FONTENOY disputée sur le théâtre européen des hostilités, le seigneur du Biez seconda le comte de la Marck dans la défense importante du poste d'Antoing ; puis à la tête des gendarmes de la garde, IL CONTRIBUA AU MOUVEMENT QUI DÉCIDA LA VICTOIRE[3]. En 1746, il s'empara de Malines.

Cependant ce n'était que partie remise. Si la France gagna à Fontenoy en 1745 elle perdit la Nouvelle-France et le Canada tout entier 14 ans plus tard. De 1744 à 1760, la Nouvelle-France se saignera littéralement en tentant de retarder l'inéluctable échéance d'une colonie bien peu estimée de son maître dit le Bien-Aimé ...

Les philosophes déclarèrent aussi absurde de dépenser tant d'argent pour "quelques arpents de neige»

 

J'ai retrouvé dans la prise de Québec en septembre 1759 les mêmes commandants qu'à Fontenoy : Jeffery Amherst, Edouard Cornwallis (fondateur de Halifax), John Forbes, Thomas Gage, Robert Monckton, John Parr, Charles Hay, Charles Lawrence, George Townshend, Michel le Courtois de Surlaville, Jean Armand Dieskau. Également John Ligonier[4] qui avait succédé au duc de Cumberland en octobre 1757 comme Commandant en chef de l'armée britannique. De plus, j'ai également découvert que le seigneur du Biez, Robert Monckton, Jeffery Amherst, Charles Hay, Jean Louis Ligonier, George Townhsend, James Wolfe, François duc de Lévis ont combattu ensemble à la bataille de Dettingen le 16 avril 1743.

Il est définitivement prouvé grâce aux archives du duc de Cumberland, conservées au Château de Windsor (Cumberland Papers, 120 cartons) et au Public Record Office PRO (Foreign Office Papers) que l'état-major britannique se trouvait au CHÂTEAU DE BRIFFOEIL[5].  Cela m'oblige d'évoquer ces illustres officiers dans les notices biographiques à la troisième partie de cet article. D'autant plus que, selon le journal (diary) de George Townshend,  certains d'entre-eux, blessés, sont morts à l'intérieur de ce camp château, n'ayant pu être évacué lorsque les Britanniques se retirèrent le soir du mardi 11 mai "at 11 p.m." de Briffoeil sur Lessines. Notons la présence d'une chapelle St.Georges (patron de l'Angleterre) à Windsor.

Il faut ici rendre hommage à Jules Renard qui publia en 1887 à la page 173 de son ouvrage Histoire de la commune de Wiers un document unique[6] : une proclamation de Maurice de Saxe[7].

 

MAURICE DE SAXE, DUC DE COURLANDE ET DE SEMIGALLIE, MARÉCHAL DE FRANCE

"Il est expressément défendu et sous peine de punition, à tous soldats, cavaliers, dragons et tous autres sans exception, de faire aucun tort ni dommages dans l'église de Wiers, maisons, cimetière, bestiaux, chevaux, domestiques, meubles et effets en dépendant.

Défendons sous peine de vie à tous soldats et autres de rien toucher ni enlever dans les lieux ci-dessus où nous avons établi un sauvegarde, que nous avons pris sous la protection du Roi et notre sauvegarde particulière.

Fait au camp de Péruwelz le 25 avril 1745."

Bon pour cinq jours                                                      (signé) M. de SAXE




1. BIOGRAPHIE

Charles de Rohan, Prince de Soubise et d'Epinoy, Duc de Rohan-Rohan, Duc de Ventadour, naquit et fut baptisé à Versailles (Notre-Dame) le 16 juillet 1715. (Fils de : Jules François Louis de Rohan, Prince de Soubise, capitaine-lieutenant des gendarmes de la garde du roi qui mourut à Paris de la petite vérole le 6 mai 1724 et de Anne-Julie-Adélaïde de Melun, fille de Louis de Melun, Prince d'Epinoy, marquis de Roubaix, connétable et sénéchal héréditaire de Flandre, et d'Élisabeth de Lorraine-Lislebonne qui mourut à Paris, de la petite vérole, quelques jours après son mari le 18 mai 1724)[8].

Il devint donc orphelin à l'âge de neuf ans et fut confié à son grand-père. Élevé à la cour, il est le compagnon de Louis XV dont il a l'âge.

Charles de Rohan hérita en 1724 la seigneurie du Biez à Wiers de son oncle maternel, Louis de Melun, Prince d'Epinoy, mort sans postérité à Chantilly le 31 juillet 1724. Charles de Rohan avait épousé :

- en premières noces, à Paris, par contrat signé le 28 décembre 1734, Anne-Marie-Louise de La Tour d'Auvergne (fille de: Emmanuel-Théodore de La Tour d'Auvergne, Pair et Chambellan de France et de Anne-Marie-Christine de Simiane de Moncha de Gordes). Elle mourut le 17 septembre 1739, à l'âge de 17 ans.

- en secondes noces, dans la chapelle du palais épiscopal de Saverne (Alsace), le 6 novembre 1741, Anne Thérèse, Princesse de Savoie-Carignan, (fille de : Victor-Amédée de Savoie, Prince de Carignan, premier prince du sang de Savoie, et de Anne-Victoire-Marie-Christine, Princesse de Hesse-Rheinfels). Le duc de Luynes nous dit dans ses mémoires : "Elle voyait fort peu de monde ; elle n'aimait point le jeu et elle était souvent chez elle, menant en tout une vie assez particulière". Elle mourut en couches à l'âge de 28 ans, le 5 avril 1745.

- en troisièmes noces, dans la chapelle du palais épiscopal de Saverne, le 24 décembre 1745, Anne-Victoire-Marie-Christine, Princesse de Hesse-Rheinfelds-Rothembourg, (fille de: Joseph Prince héréditaire du Landgraviat de Hesse-Rheinfelds-Rothembourg et de Christine Anne Louise, Princesse de Salm). Comme son époux, elle eut une vie amoureuse particulièrement agitée et dissipée. En 1757, elle fut arrêtée à TOURNAI par ordre du roi, alors qu'elle s'enfuyait avec 900.000 livres de ses diamants et bijoux pour aller rejoindre son amant, M. de Laval-Montmorency (?). Le Prince de Soubise excédé la renvoya à ses parents avec 24.000 livres de pension et  alla résider à Echternach. Elle mourut en Allemagne le 1 juillet 1792. D'après Michel Huberty et Alain Giraud dans L'Allemagne Dynastique, tome I (Hesse-Reuss-Saxe), 1976, p.146, elle mourut à Paris le 1-7-1792. Elle épousa par procuration le Prince de Soubise à Anhalt le 12-12-1745 et en personne à Saverne le 24-12-1745. Celle-ci se serait remariée, d'après le Dictionnaire des Maréchaux de France du Moyen-Age à nos jours, intro. de Joseph Valynselle, avec un roturier, avocat au parlement et ancien caissier des vivres aux armées, Jean-François MOREL.

 

D'après le Dictionnaire de la Révolution et de l'Empire par E. Boursin & Augustin Challamel, Paris, 1893. Charles de  Rohan était un courtisan fieffé, au mieux avec la Pompadour[9] et la Du Barry[10].

Nommé mousquetaire gris en 1732;  troisième guidon de la compagnie des gendarmes de la garde, avec rang de mestre de camp, par brevet du 12 mai 1732;  second guidon de la même compagnie le 16 juillet 1733, à la promotion du marquis de Lignerac. A commencé de servir en 1733 au siège de Kehl. Aide de camp du maréchal de Berwick il participe en cette qualité au siège de Phillipsbourg où Berwick est tué. En  1735 dans l'armée d'Allemagne; obtint, sur la démission du Prince de Rohan, son aïeul, au mois de juillet 1734, la charge de Capitaine-Lieutenant des Gendarmes de la Garde ; fut reçu par le Roi à Fontainebleau, à la tête de la Compagnie, le 11 novembre suivant ; a été fait Brigadier de Cavalerie le 1 janvier 1740 ; a eu, le 1 juillet 1741, la survivance du Gouvernement de Champagne & de Brie, dont son grand-père était pourvu ; a servi dans l'armée de Bohême en qualité d'Aide de Camp du Maréchal duc de Belle-Isle ; s'est trouvé à un combat de cavalerie qui précéda de quelques jours la tranchée ouverte devant Prague, et où il eut un cheval tué sous lui[11].  Maréchal de camp, par brevet du 14 mai 1743. Il a été employé en cette qualité à l'armée du Rhin, sous le Maréchal de Noailles, et combattit à la bataille de Dettingen le 27 juin ;  A l'occasion de cette bataille Haendel composa un superbe Te Deum.

Employé à l'armée de Flandre, sous le roi, par lettres du 1er avril 1744. Aide de camp du roi, par brevet du 1er mai suivant, il servit au siège de Menin qui capitula le 4 juin, d'Ypres qui capitula le 27, de Furnes qui se rendit le 10 juillet. Il passa de Flandre en Allemagne avec le roi, fut employé à l'armée du Rhin par lettres du 19 juillet. Il servit au siège de Fribourg, il y monta la tranchée le 26 octobre; il y fut blessé d'un coup de pierre qui lui cassa le bras et lui fit une contusion très considérable. Fribourg capitula le 6 novembre 1744.


Aide de camp du roi à l'armée de Flandre, par lettres du 1er avril 1745. Il combattit à Fontenoy le 11 mai, CONCOURUT À LA PRISE DE TOURNAI qui capitula le 23 mai, de la citadelle qui capitula le 20 juin. Employé à la même armée, par lettres du 1er mai 1746 et Aide de camp du roi, il combattit à Raucoux le 11 octobre. Employé à la même armée, par lettres du 1er mai 1747 et Aide de camp du roi, il combattit à Lawfeld le 2 juillet. Lieutenant général des armées du roi par pouvoir du 1er janvier 1748. Il est devenu Duc de Rohan-Rohan à la mort du prince de Rohan le 26 janvier 1749.

Nous trouvons à Wiers François Leclercq, Garde des bois du prince de Soubise. François Leclercq se maria à Harchies le 3 mai 1708 avec Michelle Moulin et mourut à Wiers le 8 janvier 1742. Nous transcrivons son acte de sépulture[12]. Nous trouvons également en 1780 Antoine Bourdon, Garde du prince de Soubise[13]. Cet Antoine Bourdon né à Wiers le 14 janvier 1738 était le fils de Jean Baptiste Bourdon, Sergent d'office au bailliage et petit-fils de Nicolas Bourdon, homme de fief sur plume à Wiers en 1679[14], marié à Wiers le 22 novembre 1689 avec Magdeleine Durot. Également à Wiers Jacques Defernez, sergent du prince de Soubise[15] vers 1759-1772. Le bailli de Wiers[16] en 1773 était Hubert Joseph Baudy, né à Rocroy le 4 mars 1735 (mort à Wiers le 24 juillet 1816) époux de Marie Louise Rivot native de Villeneuve en Champagne.

Charles de Rohan, fut un grand seigneur, un excellent courtisan, mais un piètre militaire. Ami de Louis XV, complètement à la solde des favorites, il devint sans talents maréchal de France, ministre d'Etat, allié à la Maison Royal ; mais on lui pardonnait presque tout, aussi bien sa faveur que les scandales de sa conduite privée, en faveur de sa générosité, de sa bienfaisance, de sa bravoure personnelle, de son zèle courageux à servir et à défendre ses amis auprès du roi[17]

Notons rapidement que Jean Moreau de Séchelles (Cercle d'Hist. et d'Arch. des Deux Vernes, No.1, juin 1996, p.17) était en relation avec le seigneur du Biez. Ce fut ce Jean Moreau (1690-1760), seigneur de Séchelles, qui tourmenta en 1747 les pauvres habitants de Brasménil et Vezon par des contributions de guerre exorbitantes.  Fils de Pierre Moreau, bourgeois de Paris, marchand drapier, secrétaire du roi et de Marie Charon. Nommé intendant de Hainaut en 1727, de l'armée de roi en Bohème et Bavière en 1741, intendant de Flandre à Lille le 1 mars 1743.

L'intendant Moreau de Séchelles (Arch.Guerre : YA 32B dossier Moreau de Séchelles)[18] contribua largement au succès de la campagne de Fontenoy en s'adonnant sans désemparer avec Maurice de Saxe aux préparatifs. Aussi quelques jours avant Fontenoy les habitants de Braffe et de Bury pâtirent des sévères réquisitions de Jean Moreau et du  commissaire des guerres en Flandre Joseph-François Foullon de Doué (1715-1789). Le quartier général de M. de Séchelles durant la bataille était alors situé à Froyennes (Château de M. de Lossy). En janvier 1755 Louis XV le nomma ministre d'Etat en le faisant asseoir au Conseil d'En-haut, contrôleur général des finances 1754-1756.

 

En 1745, à Fontenoy, Soubise seconda le comte de la Marck dans la défense importante du poste d'Antoing ; puis à la tête des gendarmes de la garde, il contribua au mouvement qui décida la victoire. Ces services lui valurent le grade de maréchal de camp en 1748, et le gouvernement de Flandre et du Hainaut, en 1751. Gouverneur général de la Flandre & du Hainaut, Gouverneur, Chef et grand Bailli de Lille, à la mort du duc de Boufflers, par provisions du 26 septembre 1751. Il s'est démis durant cette année du Gouvernement de Champagne. Il a commandé le camp d'Aimeries sur la Sambre, par pouvoir du 13 juin 1753. Ce camp a duré du 1er au dernier septembre. Il a commandé le camp assemblé au même lieu pendant le mois de septembre de l'année 1754. Il a commandé LE MÊME camp[19] assemblé depuis le 26 août jusqu'au 25 septembre 1755 par pouvoir du 31 juillet. A été employé pour commander en Flandre et sur les côtes, sous le Maréchal de Belle Isle par lettres du 31 décembre.
Lorsque la guerre de Sept Ans commença le crédit de Madame de Pompadour, son amie[20], fit obtenir à Soubise, le commandement d'une division de 24.000 hommes, stipulée par le traité de 1757. Ses opérations furent d'abord très heureuses ; en moins de huit jours, il prit Wesel, le pays de Clèves et de Gueldre, et poussa les Prussiens jusqu'auprès de l'armée hanovrienne, commandée par le duc de Cumberland. La bataille d'Hastenbeck, gagnée par le maréchal d'Estrées, la convention de Closter-Seven[21], jointes aux progrès de Soubise avaient placé Frédéric dans la situation la plus désespérée. La guerre eût pu se terminer dès lors à l'avantage de la France, si au lieu de s'arrêter après cette convention, Richelieu[22] eût marché vers Magdebourg, et opérer sa jonction avec Soubise, dont les troupes combinées avec celles du prince de Saxe-Hildburghausen, s'étaient avancées jusqu'aux environs de Dresde. Cependant Frédéric II résolu de mettre à profit le peu d'accord de ses ennemis pour se porter à leur rencontre. L'échec qu'il essuya dans Gotha, fut le prélude d'une plus grande ignominie. Surpris dans cette ville par un corps de 2.000 prussiens, il n'eut le temps de se jeter à cheval pour s'enfuir, laissant prisonniers plus de 180 des siens. On était à la fin d'octobre 1757 ; la cour de Versailles avait déjà donné l'ordre de prendre des quartiers d'hiver. On repassa la Saale pour se préparer à attaquer Leipzig. Le roi de Prusse, suivant de près l'armée combinée dans ce mouvement de retraite, n'éprouva quelque résistance qu'au pont de Wessenfelds. Impatienté de cette guerre sans résultat, il chercha tous les moyens d'inspirer à l'ennemi une confiance trompeuse. Pendant quelques jours, il se tint immobile à Rosbach, Soubise et Hildburghausen, reconnaissant le petit nombre de ses troupes, qui ne s'élevaient pas à plus de 20.000 hommes, méprisèrent un ennemi si faible, eux qui en avaient 60.000, et crurent pouvoir lui couper la retraite en filant sur Mersbourg. Le 3 novembre 1757 les Français furent écrasés par l'artillerie  prussienne malgré une forte réserve, sous les ordres du comte de Saint-Germain[23], qui ne parut que pour protéger la retraite. Cette inaction fut jugée bien suspecte. La journée de Rosbach ne fut pas moins honteuse pour la France, que celle de Fontenoy lui avait été glorieuse. Frédéric II fit élever une colonne commémorative de cette victoire, colonne que Napoléon renversa en 1806, après la bataille d'Iéna. Rosbach consolida le cabinet britannique et y consacra la suprématie de Pitt, entre les mains de qui passa entièrement la conduite politique et militaire de la guerre. En accablant le prince de Soubise de ridicule, on voulut lui faire porter tout le poids d'une défaite dont il n'était pas pleinement responsable.

La lettre même de Soubise au roi exprimait assez toute l'étendue de sa défaite. "J'écris à Votre Majesté dans l'excès de mon désespoir, la déroute de votre armée est totale. Je ne puis vous dire combien de ses officiers ont été pris, tués ou perdus".[24]  Cette lettre, et la modestie de Soubise de se mettre sous les ordres du maréchal de Richelieu, réparèrent aux yeux de bien des gens la faute qu'il avait commise de se charger d'un emploi au-dessus de ses forces. On doit ajouter que ses partisans ont prétendu qu'il avait été forcé d'attaquer, par le prince de Saxe-Hildburghausen, aux ordres duquel il devait déférer. Il revint tout honteux à la cour, et il se vit pendant plusieurs mois en butte aux épigrammes les plus cinglantes et sanglantes :

- Soubise dit, la lanterne à la main :

- J'ai beau chercher. Où diable est mon armée ?

- Elle était là pourtant hier matin.

- Me l'a t'on prise ou l'aurais-je égarée ?

- Ah !  je perds tout. Je suis un étourdi.

- Que vois-je, ciel ! que mon âme est ravie !

- Prodige heureux. La voilà ! La voilà !

- Eh ventrebleu ! Qu'est-ce donc que cela ?

- Je me trompais : c'est l'armée ennemie.

Il fut en quelque sorte dédommagé par les faveurs du roi. Au moment où l'on renvoyait le marquis de Paulmy[25] du Ministère de la guerre, on lui conféra le titre de ministre d'Etat, on lui conserva son logement à l'Arsenal puis on lui donna 50.000 livres de pension. Il eut en outre, l'agrément de traiter de la charge de trésorier, ce qui entraîna la décoration du Cordon bleu. Il trouva en son amie la marquise de Pompadour, un ardent défenseur qui accusera Richelieu de tous les maux.

 

En 1758, une nouvelle armée lui fut confiée. Il brûlait d'effacer le souvenir de Rosbach, et parvint du moins à l'affaiblir par deux combats dont il sortit vainqueur des Hessois, Hanovriens et Anglais. Il commanda l'armée auxiliaire envoyée en Hesse, par pouvoir du 1er mai 1758. Il rassembla toute son armée à Friedberg les 12 et 13 juillet, s'empara par un détachement le 16 de la forteresse de Marbourg, que les ennemis abandonnèrent au moment où on se disposait à l'escalader : on y trouva une grande quantité de fourrages, d'autres munitions et beaucoup d'artillerie. Les ennemis avaient un camp de 6.000 hommes à Birgel, ils occupaient le poste de Kirchhain sur la Lahn: il les en délogea le 20. Un détachement qu'il commanda, prit le même jour le fort de Ziegenhain. On trouva dans ce fort 14 pièces de canon et 6.000 sacs de farine.

La conquête du Landgraviat de Hesse fut le fruit de deux journées (13 juillet 1758 : combat de Sundershausen et 10 octobre 1758: combat de Lutzelberg). Le prince de Soubise avait détaché en septembre plusieurs corps de troupes qui se répandirent dans l'Électorat d'Hanovre, pour en exiger des contributions. La ville d'Hanovre fut contrainte de payer 4 millions. Neuf jours après la bataille de Lutzelberg (bien que remportée par François Chevert), Louis XV envoya à Soubise le bâton de maréchal de France. De tous les courtisans, il était le plus chéri de ce prince. Aussi appelait-on Soubise "l'ami du coeur, son Soubise".

Le 9 novembre 1758 le Maréchal Prince de Soubise détacha deux brigades d'infanterie et deux de cavalerie et s'empara du château de Spangenberg. Ce château situé sur une montagne, à demi taillé dans le roc, environné d'un double fossé avec 300 hommes de garnison, aurait pu se défendre contre un corps d'armée, mais le pont levis était baissé !  On trouva dans cette place 18 canons, 300 fusils, 2.000 boulets, 600 grenades, 44 barils de poudre et 18 moulins à bras. On y fit 42 prisonniers dont le commandant du château et un capitaine. Il chassa le 16 novembre les Hanovriens de la petite ville de Witzenhausen dont ils s'étaient emparés le 15. Il fit ensuite attaquer et prendre le château de Rheinsfeld, Saint-Goar, Schuartzhausen et le château de Calze. Il prit dans Rheinsfeld 72 pièces de canon et 35 mortiers ; on y fit 530 prisonniers. Instruit en 1759 que les ennemis avaient formé le projet d'attaquer les quartiers des Français, il prit le parti, pour les mettre en sûreté et pour protéger tout à la fois le Collège Électoral, d'occuper la ville de Francfort : Le prince de Soubise y fit entrer les troupes le 2 janvier 1759. Jacques Philippe Potier, de Quevaucamps,  servi sous Soubise en Allemagne en 1759.


Revenu de l'armée, il a prêté serment comme Maréchal de France le 11 février 1759 et a été fait Ministre d'Etat[26] le 18 du même mois. Pendant la campagne de 1761, il commandait une armée de 110.000 hommes sur les bords du Rhin. Le maréchal de Broglie[27], qui avait un corps bien moins nombreux sur le Mein, murmurait de se voir réduit à un rôle secondaire, et fomentait dans le camp de Soubise l'esprit de mécontentement et d'indiscipline. Les deux armées en agissant ainsi séparément n'avaient que de faibles succès. Broglie proposa d'en opérer la jonction. Broglie impatient de justifier la confiance de l'armée, mit en mouvement ses propres troupes, et en donna un avis trop tardif à Soubise, qu'il voulait seulement rendre témoin de sa victoire;  mais sa confiance présomptueuse fut trompée: il fut battu en juillet à Willingshausen : et il accusa de ne l'avoir point secouru, son collègue, qui se plaignit avec raison de n'avoir pas été averti. Les deux généraux envoyèrent à la cour des mémoires contradictoires. Broglie fut rappelé et exilé dans ses terres. Soubise montra une nouvelle fois son manque de génie sur le front de Westphalie à la bataille de Wilhemstal (24 juin 1762).

Le seigneur du Biez fut alors chargé de se borner à défendre ce que les Français possédaient encore en Allemagne ; il eut le bon esprit de se laisser guider par les conseils du maréchal d'Estrées[28] et rendit des services utiles. Tous deux gagnèrent en 1762 la bataille de Nauheim / Johannisberg (région de Kassel). Ce fut le terme de la carrière militaire de Soubise. Depuis ce temps, sa vie ne fut plus que celle d'un courtisan voluptueux, sincèrement attaché à Louis XV, n'ayant d'autre volonté que celle du roi, et flattant ses penchants par affection plutôt que par intérêt, car il savait parler au roi avec franchise dans l'occasion. Lorsque Louis XV aima Madame du Barry, Soubise s'attacha à la nouvelle favorite. Lors de la dissolution du parlement en 1771, il fut chargé par le roi de ramener le prince de Condé qui s'était retiré de la cour, après avoir signé la protestation des princes. A la mort de Louis XV, lorsqu'on porta avec tant d'indécence ses derniers restes à Saint-Denis, Soubise seul de tous les courtisans suivit le cortège, composé de quelques valets et de quelques pages, et ne se sépara de la dépouille mortelle du roi que lorsqu'elle eut été déposée dans son dernier asile.

Ses liaisons avec Madame du Barry[29] lui avaient fait perdre beaucoup de sa considération et il avait résolu de se retirer de la cour, mais Louis XVI instruit de la conduite de Soubise aux obsèques de Louis XV, lui fit dire par la comtesse de Marsan[30], de reprendre sa place dans le conseil des ministres. Cependant, il émettait ses opinions avec une modération qui prouvait autant de bon sens que de véritable politique. Il ménageait les économistes ; non qu'il les estimât ; c'était, disait-il, "crainte de plus grands maux".  Sa vie privée était moins louable ; même dans sa vieillesse, il se piquait d'entretenir à grands frais des filles d'opéra. On a même accusé le duc d'Orléans d'avoir profité bassement des sommes que Soubise prodiguait à la Michelon, courtisane alors célèbre par le nombre et la haute qualité de ses adorateurs[31]. La correspondance de Voltaire atteste qu'il ne craignait pas de faire passer au maréchal de Soubise des exemplaires de libellés irréligieux  qui se fabriquaient à Ferney[32]. C'est un des traits les plus caractéristiques de l'insouciance des ministres de Louis XVI. Les mémoires de l'abbé Georgel[33] représentent Soubise caché dans les secrets du ministère occulte de Louis XV, et mêlé dans toutes les intrigues qui se rattachent à l'ambassade du cardinal de Rohan à Vienne, ainsi qu'à la nomination de ce prélat à la dignité de grand-aumonier de France. En 1774 Louis XV venait d'apprendre que son Secret, déjà traqué en France par son propre ministre le comte de Broglie, avait été découvert à Vienne. Le prince de Rohan, son ambassadeur à cette cour, avait réussi à se procurer des dépêches déchiffrées par le "cabinet noir" impérial : au nombre de celles-ci figuraient plusieurs des correspondances du Secret. Il s'abstint prudemment de les envoyer à d'Aiguillon (Emmanuel Armand de Vignerod du Plessis de Richelieu, ministre et secrétaire d'Etat), mais les fit parvenir à son parent le prince de Soubise, pour qu'il les remît à Louis XV. Ce n'était pas la première fois que le roi était averti des interceptions effectuées à Vienne. A partir de 1770 la correspondance secrète et en régle générale, les expéditions qui traversaient les États de Marie-Thérèse avaient été systématiquement décachetées et connues.

Dans sa magistrale étude "Wiers et son église", Tournai, Casterman, 1910, Jules Renard-Huvelle,  Bourgmestre de Wiers mentionne à la page 90 :

"Une particularité assez mystérieuse, relative à l'incendie du clocher, mérite d'être signalée. Pendant le sinistre on apercevait, emportées par la tempête, des feuilles de papier en flamme /... /. C'étaient des quittances émanant du trésorier des revenus casuels de l'office de Gouverneur, sous le roi de France Louis XV. L'une était libellée sous le nom de / JEAN-PAUL-FRANCOIS DE NOAILLES, GOUVERNEUR ET CAPITAINE DES CHASSES DE SAINT GERMAIN /  /... / ces quittances étaient de l'import de 6000 livres chacune, elles portaient la signature d'un certain / " BERTIN " / et étaient datées de Paris, en 1766 ".

Jules Renard se pose alors ces questions :

"Comment cette liasse de quittance se trouvait-elle dans le clocher ? Fut-elle abandonnée à cet endroit en 1792 par des officiers français qui y aurait établi un poste d'observation, à l'époque où les troupes de Dumouriez campaient à Maulde et les Impériaux à la barrière de Bury ? Ou bien fut-elle cachée dans le clocher pendant la Révolution ? Ce mystère, nous en sommes certains ne sera jamais éclairci".

Je suis maintenant à même de répondre à ce "mystère" mentionné par Jules Renard. En 1771, le Conseil d'En-haut était réduit à quatre ministres : Soubise, Louis Phélypeaux La Vrillière, Henri Léonard BERTIN et l'abbé Joseph Marie Tarray[34].

Nous avons donc la preuve que le seigneur du Biez à Wiers connaissait bien Bertin.

Jean-Paul-François de Noailles était le fils de Louis de Noailles, duc d'Ayen, maréchal de France en 1755 (Soubise en 1759), gouverneur du château de Saint-Germain-en-Laye et de capitaine des chasses royales dans le canton. Or, il existe des preuves de liens d'affaires à Chatou et au Vézinet entre les familles Réal, Bertin et de Noailles (Pages 7 à 19 de l'ouvrage de Louis Bigard.- Le comte Réal ancien Jacobin. De la Commune Révolutionnaire de Paris à la Police Générale de l'Empire. Versailles, 1937. 210 p). Le seigneur de Chatou était Henri Léonard Bertin[35], ministre d'Etat et secrétaire d'Etat, Contrôleur général des Finances l'un des premiers postes de l'Etat. Il tenta en 1763 pour remplir les coffres royaux, de faire admettre les emprunts à viager et la création d'octrois dans les villes et bourgades. Bertin fut le véritable créateur et organisateur des Archives Nationales de France et le fondateur vers 1761 de la Société Nationale d'Agriculture qui devint l'Académie d'Agriculture. Bertin fut un courtisan habile, diplomate adroit, administrateur exceptionnel. Il fut l'Intendant très regretté d'une des premières intendances de France, celle de Lyon. Auparavant il fut Intendant du Roussillon. Bertin administra aussi certaines provinces et généralités: la Guyenne, la Normandie, une partie du Perche, de la Champagne et de la Brie, la principauté de Dombes et le Berry. Il mourut en Belgique, à Spa, en émigration, le 16 septembre 1792.


Les papiers qui disparurent en fumée en 1910 dans le clocher de l'église ont donc, à mon avis, été placés par sécurité vers 1770-1787 (Peut-être à la vente du Biez ou à la mort de Soubise). Ces documents ministériels datés de Paris 1766 ne sont pas arrivés par hasard à Wiers. Ceci me porte à croire que Soubise avait un bureau au Biez. Documents comptables ayant possiblement rapport avec "le département des affaires de M.Bertin" et peut-être l'affaire Dumouriez (Notons que notre fameux Général bien connu à Vergne se trouvait  avec Soubise en 1757 dans l'Armée du Hanovre. De plus il fut chargé de différentes missions, dont une secrète en 1773 en Allemagne, par le lieutenant général des armées et secrétaire d'Etat de la guerre Louis-François de Monteynard[36] et connue du Roi. Dumouriez travaillait déjà sur des matières ou il était question d'échafauder des combinaisons pour rapprocher la France et la Prusse ! Le ministre d'Aiguillon mécontent de ne pas en avoir eu connaissance le fit arrêter à Hambourg en septembre 1773 et impliqué dans ce qui a été appelé "le complot de la Bastille"et incarcéré avec Jean Louis Favier et Jean Louis Ségur). Vingt ans après, Dumouriez remets ça, si je puis dire, à Wiers, mais cette fois il avait deux jours avant, à partir de son camp de St-Amand, livré à l'Autriche quatre députés de la Convention et le ministre de la Guerre Pierre-Paul Beurnonville qui furent incarcérés dans une forteresse à Olmutz (Tchécoslovaquie)[37].

Lorsque la culture de la pomme de terre commença à s'implanter à Wiers[38], en 1774, le prince de Soubise, par requête du 14 novembre 1775, prétendit à son droit de terrage sur cette nouvelle récolte. La commune ayant refusé de se soumettre à cette taxe, l'affaire fut portée pardevant le Parlement de Douai, qui rendit un arrêt, le 27 juin 1776, condamnant la commune de Wiers à payer à Charles de Rohan le droit par lui réclamé et de plus, à subir les dommages et dépens de l'instance. Ce furent Jean-Philippe Quiévy et Jean Baptiste Beudin échevins, qui furent délégués pour représenter la commune dans cette procédure[39]. En 1773, Parmentier sort son ouvrage Examen chimique des pommes de terre. Auparavant, à la suite de la famine de 1769, la Société savante de Besançon avait mit au concours, en 1771, un prix sur le sujet suivant: Des substances alimentaires qui pourraient atténuer les calamités d'une disette". Le mémoire de Parmentier fut classé premier. Il y notait : "La pomme de terre pourrait-être, parmi nous, le puissant auxiliaire du blé." Le texte fut imprimé et diffusé par ordre du ministre Léonard Bertin[40] et fut réimprimé en 1778. Soubise étant dans l'entourage de Parmentier à Paris, évidemment Wiers ne pouvait que perdre le procès contre le seigneur du Biez.

Les habitants de Wiers, soumis au droit de meilleur catel (sorte d'impôt sur l'héritage) envers le prince de Soubise, entamèrent des négociations en 1779, à l'effet d'obtenir de pouvoir s'acquitter par abonnement. Le prince, ayant accepté l'offre de ses sujets, il fut annoncé le 19 septembre, à la sortie de la messe paroissiale, que le mayeur et les échevins s'assembleraient le même jour après les Vêpres, à l'effet de recevoir les oppositions qui seraient faites à la conversion du droit du meilleur catel en une rente annuelle de 180 livres. Personne ne s'étant présenté, on sollicita de l'intendant du Hainaut, Sénac de Meilhan[41], l'autorisation d'affecter au service de la rente la partie disponible des revenus des biens communaux et, en cas d'insuffisance de ces revenus, de prélever un impôt proportionnel sur les habitants ; l'autorisation fut accordée le 24 novembre ; un mois après (le 23 décembre), le contrat d'abonnement était signé.[42]


A une telle ascension de la famille avaient succédé de sombres lendemains. Henry-Louis Marie de Rohan, prince de Guéméné, grand chambellan de France, et son épouse Victoire Armande de Rohan Soubise (fille du seigneur du Biez),  gouvernante des enfants de France et l'une des favorites de la reine Marie Antoinette, firent en septembre 1782 une faillite retentissante, par une banqueroute de 33 millions qui fut l'un des scandales des dernières années de l'Ancien Régime.

Charles de Rohan dut aussi se retirer et cesser de siéger au Conseil des ministres quand l'affaire du Collier éclate en 1785 et que s'ouvre le procès du cardinal de Rohan (Louis-René-Edouard, prince de Rohan) son parent. Cette autre affaire scandaleuse eut un grand retentissement dans toute l'Europe.

En 1786, la chapelle du château du Biez avait été conférée au nom du prince de Soubise par Hubert Joseph Baudy, bailli de Wiers, à Jean François Flescher (Harchies 1758-Mons 1830)[43], clerc tonsuré du diocèse de Cambrai, qui y faisait célébrer les messes d'obligation par Louis François Lenglez (Condé 5 mai 1747-26 février 1787), prêtre et ancien Brigittin de Péruwelz, fils de Nicolas Lenglez, maître batelier à Condé-sur-Escaut, et de Jeanne-Marguerite Guenin.

Charles de Rohan, Prince de Soubise, seigneur du Biez (à Wiers) mourut à Paris le 1 juillet 1787 frappé d'une apoplexie. De ses trois mariages, il n'eut que deux filles, la branche de Rohan-Soubise s'éteint donc avec lui. Le château et domaine du Biez passe alors à Anne-Emmanuel-Ferdinand-François duc de Croy, seigneur de Condé et de Péruwelz.

 

Raymond BULION Jr

                         (à suivre ... Correspondance de Charles de Rohan à Monsieur Desprez & Archives Rohan)

 

 

(SUITE)

2. CORRESPONDANCE DE CHARLES DE ROHAN À MONSIEUR DESPREZ & ARCHIVES ROHAN

Seules les traduction et dactylographie de cette correspondance ont été faites par les Archives Nationales du Québec.
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ANALYSE: Cette lettre est datée de Aimeries le 1er septembre. Soubise n'a pas mentionné l'année. Cependant j'ai pu la découvrir par recoupements d'informations. Aimeries se trouve dans le Nord entre Berlaimont et Pont-sur-Sambre.

Cette lettre est assez révélatrice du caractère du personnage. Il faut d'abord remarquer que "le seigneur du Biez" est un homme précautionneux, très humain envers ses hommes, qu'ils les apprécient beaucoup :

"je crains que les troupes ne s'en ressentent"

"ce serait grand dommage de les exposer aux maladies"

"les troupes sont belles et pleines de bonne volonté"

"nos jeunes colonels sont charmants et seroient tres affligez, si nous etions obligez de décamper, je le crains  beaucoup"

"et veiller de préférence à tout a la conservation des troupes"

"je suis tres affligé de toutes ces contrarietez"

Voici ce que m'écrit le S.H.A.T de Vincennes[44] en mai 1998 :

" Le camp d'Aymeries ou de la Sambre s'est tenu en septembre 1753. Nous conservons un dossier le concernant sous la cote YA175. Charles de Rohan, prince de Soubise, lieutenant général des armées du roi, était le commandant en chef des troupes qui y ont pris part.

M. de Blair était en 1753 intendant de justice, police et finances de la généralité de La Rochelle. Il reçut une commission pour la généralité de Hainaut le 1er décembre 1754 (dossier personnel coté YA33). Toussaint Alexis Prat-Desprez, premier commis de la Guerre, était chef du bureau du Mouvement des troupes au secrétariat d'Etat de la Guerre, à cette époque. Son dossier individuel est conservé sous la cote YA27 ".

 

Le S.H.A.T ne m'a pas répondu au sujet de l'année précise de datation de la lettre.

 

Je n'ai pas poursuivi la recherche au sujet de l'informateur de Dunkerque qui instruisait Soubise sur les affaires d'Amérique.

Un magnifique plan aquarellé de ce camp d'Aimeries (Camp d'Aymeries (Nord) commandé par le maréchal de Soubise. Première position de la manoeuvre faite les 19 et 24 septembre 1754) se trouve aux A.N.à Paris (Cote  273 AP34*).

Autres informations sur les familles De Blair et Prat-Desprez[45]


Louis Guillaume de Blair, baptisé à Paris (St-Eustache) le 11 avril 1716 (fils de: Louis François de Blair, conseiller au Parlement de Paris, et de Catherine Jeanne de Gars de Boisemont). Mort à Paris le 7 mai 1778.

Marié par contrat signé à Paris le 16 avril 1755, à Jacqueline de Flesselles 1736-1794 (fille de: Jacques de Flesselles, banquier, intéressé dans les affaires du roi, secrétaire du roi 1735-1758 et d'Elisabeth Robinet). Nommé conseiller au Parlement de Paris le 27 juillet 1736; maître des requêtes le 26 janvier 1742, intendant de la Rochelle, le ... 1749 ; intendant de Hainaut, le 1er décembre 1754, intendant d'Alsace, le 4 novembre 1764, conseiller d'Etat, le 29 septembre 1767.

Toussaint Alexis Prat-Desprez, Né vers 1703, fils de François Prat et de Alexise Mansard. Mort le 5 octobre 1758. Commissaire des Guerres, premier commis de la Guerre et des Haras, contrôleur de l'Ordre de Saint Louis. Marié le 11 mars 1733 à Jeanne Louise Hyacinthe de Bonneval (fille de: François, commissaire des Guerres et de Geneviève Colin).

 

Comment retrouver l'année de la correspondance du prince de soubise ?

Je savais seulement que la lettre avait  été écrite à Aimeries le 1er septembre.

1. Il existe aux Archives Nationales de France (=A.N.) deux documents intitulés :

- Journal du camp de la Sambre, commandé par le prince de Soubise au mois de septembre 1754. (Cote 273 AP 34*) 1 registre in-f° relié cuir, 263 pages, 10 plans aquarellés

- Journal du camp d'Aymeries, commandé par le prince de Soubise, 1755. (Cote 273 AP35*). 1 registre in-f° relié cuir, 185 pages, 4 plans aquarellés

 

2. M. Pinard dans Chronologie historique-militaire, contenant la création de toutes les charges militaires, Paris, Claude Hérissant, 1761, mentionne au tome III, pp.454-455 :

- il a commandé le camp d'Aimeries sur la Sambre, par pouvoir du 13 juin 1753. Le camp a duré du premier au dernier  septembre.

- il a commandé le camp assemblé au même lieu pendant le mois de septembre de l'année 1754.

- il y a commandé un camp assemblé depuis le 26 août jusqu'au 25 septembre 1755, par pouvoir du 31 juillet.

 

En fonction des points 1.) et 2.) la question se posait donc de savoir si la lettre était datée du 1er septembre 1753,  du 1er septembre 1754 ou du 1er septembre 1755 ! Soubise mentionne sans sa lettre "l'avantage que nous avons remporté en Canada mettra les Anglois de mauvaise humeur".

A part les contestations de la France dans la vallée de l'Ohio au sujet de l'infiltration de trafiquants de fourrures des colonies anglaises il n'y eu aucuns faits militaires importants en 1753 si ce n'est que la construction de forts entreprise par la France qu'elle échelonna depuis le sud du lac Érié jusqu'à la rivière Ohio.

Deux chocs militaires importants entre les Anglo-Américains, Canadiens et Français se produisirent à l'époque en Amérique du Nord française. Le premier eu lieu le 3 juillet 1754: combat du Fort Necessity, le deuxième le 9 juillet 1755: bataille de la Monongahela. Je reparlerais de ces deux événements tragiques dans Charles de Rohan et son temps (la guerre de Sept Ans en Amérique du Nord 1756-1763), 3ième partie de cet article.

De nouveau, la question se posait: la lettre était-elle datée du 1er septembre 1754 ou du 1er septembre 1755 ?

De plus, dans les deux combats susmentionnés il s'agissait d'une victoire française (Soubise parle d'un "avantage") sur les Anglais. Mais, le prince de Soubise avait écrit : "En attendant Mr de Blair et moi nous donnerons toutes les facilitez, qui ne couteront pas au Roy". Or, Blair devint Intendant de Hainaut le 1er décembre 1754.  Par conséquent, il est facile de déduire que l'avantage remporté sur les Anglais au Canada est la bataille de la Monongahela (bataille gagnée le 9 juillet 1755 par Daniel Hyacinthe Liénard et Jean Daniel Dumas[46] contre les troupes anglo-américaines d'Édouard Braddock sous les ordres du duc de Cumberland). 10 ans après Fontenoy.

Comme l'écrit Soubise, l'informateur de Dunkerque était très bien instruit. Un mois et une quinzaine de jours, c'était donc  le temps que mettait une information pour traverser l'Atlantique en 1755 (de la région de Pittsburgh à Dunkerque).

Selon l'abbé Petit dans son Histoire civile et religieuse de la Ville de Péruwelz, Emmanuel de Croy né à Condé le 13 juin 1718 commanda le camp d'Aymeries en 1754 et 1755 et servit sous Soubise en 1761 dans l'Armée du Rhin. C'est lui qui fut reçu à Péruwelz par les habitants du Tapis-Vert et fut complimenté par Philippe Alexandre Baugnies-Wilbaux, aubergiste, lorsque'il devint Maréchal de France en 1783. C'est  sous la direction personnelle d'Emmanuel de Croy que fut construit en 1774 le pavé de Bonsecours à Péruwelz et en 1779 la chaussée de Bonsecours vers Condé.

Signalons que Charles de Rohan, prince de Soubise, seigneur du Biez, gouverneur et lieutenant-général des provinces de Flandre et Hainaut émis des ordonnances fixant la clôture et portant règlement pour l'interdiction de la chasse, ainsi que des ordonnances portant règlement sur l'ouverture, l'exercice, la réglementation  de la chasse dans les provinces de Flandre et Hainaut. Ces ordonnances s'échelonnent de 1759 â 1772 (Lille, Camp de Raun, Camp de Krumbach, Paris, Choisy, Compiègne, Versailles). Ces ordonnances furent imprimées à Lille, impr. de N-J-B Péterinck-Cramé, in-4, 4p. La Bibliothèque Nationale à Paris possède la collection de ces ordonnances-environ 25. Charles de Rohan émis également une ordonnance (Valenciennes-18 juillet 1764) portant règlement pour la composition, l'organisation et l'exercice des gardes dans les bourgs et villages de Flandre et de Hainaut (Lille, impr. de N. Péterinck-Cramé, in-4, 6p.).

 

ARCHIVES DE LA FAMILLE ROHAN

Les archives des Rohan-Guéméné et des Rohan-Soubise se trouvaient au château de Sichrow, en Bohême. Après la nationalisation du château en 1945, elles ont été, après un séjour aux Archives de l'Etat à Prague, transportées en 1965 à la succursale des Archives d'Etat de Litomerice à Decin (Tchécoslovaquie).

Une autre partie du fonds avait été déposée chez un banquier d'origine belge, Louis François Xavier de Clercq, associé de la Banque Lefebvre-Meuret de Tournai, qui avait été le fondé de pouvoir des Rohan émigrés. Ces archives furent conservées avec les papiers de la maison de Clercq dans les combles de l'hôtel, dit hôtel de Richepanse, 3, rue Masseran, à Paris, que le banquier acheta en 1818. Elles lui servirent à démêler l'écheveau très enchevêtré des affaires de la famille, et notamment à assurer la liquidation de l'énorme passif de la faillite Guéméné. 

C'est le petit-fils de M. de Clercq, le comte Henri de Boisgelin, qui avec la plus grande générosité versa aux Archives Nationales de France cet ensemble historique de grande valeur restés inconnus des érudits. Il signa le 17 juin 1966, un contrat de dépôt avec M. André Chamson, de l'Académie française, directeur des Archives de France.

Les papiers personnels de Rohan-Soubise commencent à 1660. L'ensemble le plus intéressant est constitué par divers papiers militaires et personnels de Charles de Rohan, prince de Soubise, seigneur du Biez, favori de Louis XV et de Madame de Pompadour. Un très beau registre contenant des lettres du ministre de la Guerre, Marc-Pierre d'Argenson, et de Louis XV au maréchal de Soubise, des journaux des camps de la Sambre et d'Aymeries en 1755 et deux importantes liasses de lettres du prince de Condé et de Choiseul en 1761 et 1762 constituent une source intéressante pour l'histoire militaire et diplomatique de cette époque. Aux papiers personnels des terres et biens des deux branches Rohan-Guéméné et Rohan-Soubise, s'ajoutent les documents provenant des familles alliées : Cochefillet, MELUN-EPINOY, Lévis-Ventadour, Lorraine, Savoie-Carignan.

 

ARCHIVES ROHAN  (conservées aux Archives Nationales de France)

Composition : 273 cartons, registres et plans. Cotes: 273 AP 1 à 273 et microfilm 286 Mi

Origine : Dépôt du comte Henri de Boisgelin  Dates extrêmes : 1002-1846

Communication : Avec autorisation écrite du déposant. Sans réserve pour le microfilm.

Inventaire : Suzanne d'Huart.- Archives Rohan-Bouillon. Paris, Imprimerie Nationale, 1970. 246p.

273 AP (1 à 175) : Branche des Rohan-Guéméné et des Rohan-Soubise: papiers personnels et de fonction, terres et biens, familles alliées. 1002-1790

273 AP (22 à 51) : Papiers personnels de membres de la branche de Rohan-Soubise

286 Mi 1 à 3 (273 AP). Archives de la famille de Rohan, conservés aux Archives de Litomerice à Decin (Tchécoslovaquie). Les 42 premiers cartons, papiers personnels des XV au XIXe s. ont été microfilmés par les soins des Archives d'Etat de Prague (286 Mi, 4445 clichés envoyés en octobre 1968 à Paris)

 

Documents choisis concernant Charles de Rohan, les seigneurs du Biez et Wiers

Note:  * désigne toujours les registres (norme Arch. Nat.)

 

1.) 273 AP 28* Partage des biens d'Anne Julie Adélaïde de Melun, veuve du prince de Soubise, entre les princes et princesses de Soubise, mineurs, 22 juin 1733

 

2.) 273 AP 33* Registre de lettres adressées par Marc-Pierre d'Argenson, ministre de la Guerre, au maréchal de Soubise, contenant des lettres signées de Louis XV au maréchal de Soubise et des états concernants l'armée et les camps d'Aymeries et de la Sambre, 3 janvier-16 décembre 1755

 

3.) 273 AP 34* Journal du camp de la Sambre, commandé par le prince de Soubise au mois de septembre 1754.  263 pages, 10 plans aquarellés

 

4.) 273 AP 35* Journal du camp d'Aymeries, commandé par le prince de Soubise, 1755. 185 pages, 4 plans aquarellés

 

5.) 273 AP 37 - Copie de lettre de Victoire de Hesse-Rheinfels, 3e épouse du maréchal de Soubise, à Yvel, 25 janvier 1781. P.j. : Mémoire pour réfuter l'accusation portée contre elle: la naissance d'un enfant en Allemagne, après la séparation d'avec le prince de Soubise.

- Dispense de consanguinité pour son second mariage avec Anne-Thérèse de Savoie-Carignan.

- Lettres adressées au maréchal de Soubise par : Louis-Joseph de Bourbon, prince de Condé (161 lettres, s.d. et 24 avril-15 nov.1762) ; le duc de Choiseul, secrétaire d'Etat des Affaires Étrangères 1758-1761 puis ministre de la Guerre 1761-1770 (52 lettres, 1er oct.1761-3 mars 1764).  

 

6.) 273 AP 38* à 41* Biens. Procès-verbaux des délibérations du conseil des affaires du prince de Soubise[47] 15 mai 1762-20 février 1787. 4 registres. Environ 800 folios.

 

7.) 273 AP 50* Registre des rentes perpétuelles et viagères (précédé d'une table alphabétique), 1771-1781. 1 registre, environ 250 folios.

 

8.) 273 AP 77* Inventaire après décès de Pélagie Chabot de Rohan, princesse d'Epinoy, veuve d'Alexandre-Guillaume de Melun, 22 août 1693.

 

9.) 273 AP 76 - Consultation sur le testament d'Ernestine d'Arenberg, princesse d'Epinoy, au sujet de 18.000 livres revenant à Charles de Melun, son fils, 1652.

- Alexandre-Guillaume de Melun: transactions et partages des biens de Guillaume de Melun, son père et du vicomte de Gand, son oncle, avec ses frères et soeurs, octobre-novembre 1662.

- Pélagie Chabot de Rohan, ép. d'Alexandre-Guillaume de Melun. Actes de procédures, constitution de rentes, testament, succession, 1680-1707.

- Transactions concernant la succession de Louis de Melun, prince d'Epinoy, 1733-1755 mort à Chantilly le 31 juillet 1724.

 

10.) 273 AP 80* Sentence de liquidation du legs universel de Louis de Melun: arrêt rendu entre Jean Alexandre Théodose, comte de Melun, et Hercule Mériadec, prince de Rohan-Soubise, tuteur de Charles de Rohan, prince de Soubise, et de ses frères et soeurs, enfants de Louis de Rohan et de Julie Adélaïde de Melun, héritiers de leur oncle, duc de Melun et de Joyeuse, 26 octobre 1734. 1 registre, 145 folios

 

11.) 273 AP 89 Mémoire sur la terre de Wiers, dans le Hainaut autrichien. s.d.

 

12.) Arch. Nat. 01164 pp.664-671. Secrétariat d'état de la Maison du roi. Actes royaux. Minutes et lettres patentes.

 

13.) Arch. Nat. Minutier central :

1.      Contrat de mariage du 28 décembre 1734, étude LXXXVIII / 541 (Maître Louis Bronod)

2.      Contrat de mariage du 10 octobre 1741, étude LXXXVIII / 577 (Maître Louis Bronod)

3.      Inventaire après décès du 10 juillet 1787 de Charles de Rohan, étude XCII / 880 (Maître Jean Louis Bro)

 

14.) Jules Guiffrey.- Documents sur l'ancien Hôtel de Soubise, aujourd'hui palais des Archives Nationales. (Adjudication de l'hôtel de Guise au prince de Soubise, scellé et inventaire des biens du prince de Soubise après sa mort). Paris, 1915. 107 p.

 

ADDENDA

J'avais mentionné dans la première partie de l'article que des recherches étaient en cours afin de savoir s'il existait des relations entre Parmentier / Soubise et Parmentier / Dumouriez. Il existe bien des relations entre Soubise et Parmentier et bien entendu entre Soubise et Dumouriez. Il n'est pas aisé d'établir des liens entre Parmentier et Dumouriez : ... ils étaient quand même tous deux dans l'armée du Hanovre, avaient presque le même âge. De plus, Dumouriez[48] fut touché par une balle de carabine à la hanche au combat d'Emsdetten, meurtri à la tête et au genou par deux balles en juillet 1760 dans la sale affaire de Warburg, criblé de 5 blessures le 15 octobre 1760 à Klosterkamp[49] (Westphalie). Peut-être fut-il soigné par Parmentier. Celui-ci avait déjà une grande réputation dans l'armée du Hanovre : n'hésitez jamais à aller chercher les blessés jusque sous le feu des canons, se dépensa sans compter au chevet des blessés. Tous louant sa bonté, sa compétence, son esprit  d'entreprise.


Le père de Dumouriez, Anne-François[50], fut nommé en 1757 commissaire des guerres à l'armée rassemblée pour opérer en Allemagne. Cependant il se brouilla, au point de démissionner, avec le comte Charles de Broglie, chef d'état major (frère de Victor-François duc de Broglie). Lors de la campagne de 1759 Victor-François de Broglie servait sous Soubise en qualité de premier lieutenant-général. A Klosterkamp, le 15 octobre 1760 Dumouriez (fils) servait comme officier d'ordonnance du maréchal Thiars. Officier de cavalerie, Charles-François Dumouriez se bat avec l'usage d'un seul bras à la bataille de Willingshausen (16 juillet 1761). Sa compagnie, dépendant de Soubise, se trouvant à la jointure avec les troupes de Charles de Broglie, à un certain moment Dumouriez découvre que les deux armées sont parties de leur côté en l'oubliant. Avec ses 150 hommes, il rejoint le corps de Broglie et demande les ordres du maréchal. "On lui répond brusquement de sa part qu'on n'a pas d'ordre à lui donner, et qu'il tâche de rejoindre son armée."  Pourquoi aiderait-on un homme de Soubise ? Ferdinand de Brunswick emporte donc cette bataille de Willingshausen et cela avec des forces très inférieures grâce à la discorde des généraux français (Soubise et les deux frères de Broglie). Voici ce qu'aurait écrit Dumouriez à ce sujet[51] : " Cette bataille est perdue par l'ambitieuse précipitation du maréchal de Broglie qui attaqua un peu trop tôt pour la gagner tout seul, et par la coupable jalousie du prince de Soubise qui sacrifie l'honneur de la France au plaisir criminel de donner une mortification à son rival, en lui laissant recevoir un échec sous ses yeux". Suite à cette défaite, les Broglie furent exilés dans leurs terres (février 1762) et Soubise remis à la tête de l'armée.

Paris chansonnait alors Soubise[52] :

Je suis un pauvre maréchal

Et je redeviens général

Depuis que Broglie, en son village,

Est renvoyé par Pompadour

 

Voici ce que nous mentionne le Général Dumouriez dans sa Galerie des aristocrates militaires et mémoires secrets, publiés à Londres en 1790 :

 "Conseillé par des fous, servis par des poltrons, Louis XV a reçu les plus sanglants affronts. Le prince de Soubise était le plus riche seigneur de la France. Ce général est un fléau national, rien ne le rebute; il a beau être déshonoré et flétri par les chansons, les brocards et les malédictions, il a une ambition constante et inaltérable. Les injures et les plaisanteries ont été poussées jusqu'à l'indécence, on en a fait un gros recueil, intitulé la Soubisade".


Parmentier[53] servait dans le corps du Maréchal d'Estrées. Nommé pharmacien de 3ième classe en mars 1757, 2ième classe en janvier 1758, de 1ère classe en juin 1760 jusqu'à la paix en 1763 (Traité de Paris). Le 16 octobre 1766 Parmentier prend officiellement ses fonctions de pharmacien gagnant maîtrise à l'hôtel royal des Invalides. Rappelons que l'armée du Hanovre en 1757 était composée de deux corps. L'un, fort de 24,000 hommes était commandé par le prince de Soubise, l'autre, de 70,000 hommes avait été confié au maréchal d'Estrées[54].  La mission de d'Estrées, était de traverser la Weser pour envahir le Hanovre, possession héréditaire du roi George II d'Angleterre. Il est  regrettable de constater qu'il n'existe aucune étude détaillée sur les guerres de Louis XV en Allemagne durant la guerre de sept ans, sauf l'ouvrage malheureusement en langue allemande de Carl Renouard, Geschischte des Krieges in Hannover, Hessen und Westfalen von 1757 bis 1763 publié en 3 volumes à Cassel par T. Fischer en 1863. 

Ce fut Léonard Bertin, du Comité d'Agriculture royal qui prévoit l'impression en 1778 du "Parfait Boulanger ou Traité complet sur la fabrication et le commerce du pain" de M. Parmentier, 696 pages. 

Parmentier fut nommé expert dans l'affaire de la poudre de la Providence (poudre-miracle qui avait la propriété de détruire les fourmis et les insectes friands de grains). Il reçut cette mission début août 1775 dans des cultures expérimentales à Chatou, sur le domaine d'Henry-Léonard Bertin[55].  Il retourna trois ans plus tard : il fut alors reçu le 20 juillet 1778 chez Réal[56], garde-chasse du roi, régisseur de la terre de la seigneurie de Bertin, ensuite garde général des forêts impériales et procureur fiscal de Chatou[57]. Parmentier, hante les antichambres de tous les ministres et des hauts fonctionnaires du royaume pour faire avancer ses projets : un jour il montra à Bertin le pétrin mécanique qu'il avait conçu de façon à remplacer le pétrissage à bras. Avec la complicité de Bertin, Louis XVI va donner en mai 1786 à Parmentier le moyen de cultiver ses pommes de terre sur un grand espace : la plaine des Sablons à Neuilly.

Il n'existe pas le moindre indice de l'entrée du seigneur du Biez dans une loge maçonnique. Je crois qu'Anne Muratori-Philip (p.146) fait une confusion en mentionnant Charles de Rohan, prince de Soubise à la loge des "Neuf Soeurs" fondée en 1776 par le savant Joseph-Jérôme Lalande. C'est dans cette loge des Neuf Soeurs que l'Encyclopédie et la Maçonnerie fusionnaient. Par contre, on trouve la présence du prince Camille de Rohan-Rochefort (1737-1816)[58], chanoine de Strasbourg, tréfoncier de l'Eglise de Liège, cousin du seigneur du Biez. On pouvait rencontrer dans cette loge des Neuf Soeurs véritable creuset intellectuel pour les maçons français : Condorcet, le littérateur Sébastien Roch Chamfort, le sculpteur Houdon, le célèbre peintre Vernet, le dessinateur-graveur Jean-Michel Moreau le Jeune, le naturaliste Lacépède, l'illustre Voltaire qui y fut initié (7 avril 1778), le duc de La Rochefoucault-Liancourt, le docteur Joseph-Ignace Guillotin, le docteur Georges Cabanis, le pharmacien chimiste Antoine-Alexis Cadet de Vaux, Jacques-Etienne et Joseph-Michel Montgolfier, l'avocat et président de la cour de Cassation Romain Desèze, l'avocat Médéric-Louis-Elie Moreau de Saint-Méry, les poètes Jacques-Antoine Rouger et Evariste-Désiré Deforges, l'architecte Charles-Axel Guillaumot, l'ambassadeur des États-Unis en France Benjamin Franklin.

                                                                                        Raymond BULION Jr

(à suivre ... Charles de Rohan et son temps (La guerre de Sept Ans en Amérique du Nord 1756-1763)

 

 


(SUITE  ET  FIN)

3. CHARLES DE ROHAN ET SON TEMPS (La guerre de Sept Ans en Amérique du Nord 1756-1763)[59]

 J'ai eu la surprise de découvrir que Jean Louis Fernig, baptisé à Château-l'Abbaye le 12 août 1772, frère des célèbres soeurs Fernig de Flines-les-Mortagne, était l'ami intime du comte de Grasse-Tilly. Le père de ce comte, c'est l'illustre amiral de Grasse, marquis de Tilly, qui décida de l'indépendance de l'Amérique par son intervention victorieuse en septembre 1781dans la baie de Chesapeake (Virginie) qui empêcha l'amiral Graves de secourir Cornwallis coincé dans Yorktown[60]. Nos familles Beudin, Audeval, Altruy, Grard, Defernez (par alliance), Quiévy, Hochez, Despinoy, Hautcoeur, Bassez, Dehennin, ont l'honneur d'être apparentées par cousinage à ce grand personnage qu'était Jean Louis Fernig de Flines-les-Mortagne. Je parlerais de cet événement dans un futur article "Notes relatives aux familles Audeval, Berthier, Dumouriez, Lasalle et Fernig - La Boucaude, la Haute Cour de Mortagne, Vergne".

C'est sans grande efficacité que le gouvernement anglais mena la première guerre, celle de la Succession d'Autriche (1740-1748). En Amérique du Nord, les efforts combinés des Américains et de la marine anglaise avaient permis la capture de Louisbourg (Nouvelle-Écosse, île du Cap-Breton) en 1745, mais ce n'est pas avant 1747 que la marine acquit la suprématie et réussit à couper temporairement les communications entre la France et ses colonies. La France se releva rapidement et reconquit son commerce extérieur d'avant la guerre. La communauté des commerçants anglais acquit la certitude qu'une guerre de spoliation était absolument nécessaire pour empêcher la France de les gagner de vitesse dans la lutte pour la suprématie. L'enjeu principal demeurait toujours les Antilles et les pêcheries de l'Atlantique Nord.

La forteresse de Louisbourg, clef du système de défense des possessions françaises en Amérique du Nord fut donc renforcée comme base navale pour la flotte qui avait pour mission d'assurer la protection des pêcheries, de garder l'entrée du Saint-Laurent et de piller les navires marchands anglais. Un groupe influent de spéculateurs anglo-américains commença à mettre à exécution un plan pour la mainmise sur la vallée de l'Ohio, menaçant ainsi l'hégémonie française dans l'Ouest. Des troupes canadiennes furent alors dépêchées sur ordre du Ministre de la Marine afin de chasser les Américains. On éleva des forts dans la région. Le premier choc eut lieu près du fort Duquesne (Pittsburgh, Penn) en 1754. La guerre entre la France et l'Angleterre ne sera déclarée officiellement qu'en mai 1756, et dans le combat qui reprit en Europe, la question coloniale ne joua tout d'abord qu'un rôle secondaire ; Cette escarmouche en lointain pays de colonisation marqua pour la France et l'Angleterre le début de la guerre de Sept Ans.  Cette guerre est connue aussi sous le nom de FRENCH AND INDIAN WAR.

Malheureusement pour la France, son gouvernement, ses grands commis et ses méthodes ne devaient pas se révéler à la hauteur de la situation et ils ne purent relever le défi que représentaient l'Angleterre et la Prusse, son alliée de fraîche date. Louis XV n'arrivait que rarement à prendre des décisions. De plus, jusqu'en 1761, date à laquelle le duc de Choiseul se vit confier les ministères de la Guerre, de la Marine et des Affaires étrangères, les ministres, la plupart médiocres, restaient peu de temps en fonction. Les ministères souffraient d'un manque de personnel et d'un excès de travail ; il en résultait des retards sans fin quand ce n'était pas une absence totale de décision. Pour embrouiller la situation davantage, les rouages administratifs étaient entravés par des intrigues byzantines et le roi lui-même excellait à ce jeu. Le laisser-aller était aussi fort à la mode à cette époque.


La force armée n'était guère en meilleure posture. Sous Louis XIV, tout comme plus tard sous Napoléon l'armée française était reconnue la meilleure d'Europe. Mais pendant le règne de Louis XV son niveau d'efficacité connut une baisse notoire. Après la mort du maréchal Maurice de Saxe, les commandants qui se succédèrent brillaient par leur incompétence. Dans ce milieu, aussi, l'intrigue régnait en maître. Chaque général  savait qu'autour de lui et à la cour il y avait des gens qui machinaient sa perte. Au niveau des régiments, les officiers ne se distinguaient point par leur compétence, le savoir-faire militaire de la plupart des colonels étant à peu près nul. Les commissions s'achetaient ; l'argent ou les relations familiales, et non le mérite personnel, décidaient de l'avancement d'un militaire.

Comme le faisait remarquer un expert en matière militaire, Jacques Antoine Hippolyte de Guibert, en parlant de l'armée française pendant la guerre de Sept Ans : "La machine est tellement usée que seul un homme de génie pourrait y toucher quoique non sans tremblement. Son génie ne pourrait suffire à en assurer le succès".

La France jouait de malheur car, avant que la guerre se soit déclarée, la marine royale anglaise sous les ordres d'Édouard Boscawen[61] s'était emparée de 300 de ses navires marchands et de 3000 marins. C'était pour la marine française un choc terrible. De plus, les épidémies qui éclatèrent dans les ports français pendant la guerre firent de très nombreuses victimes. Seulement à Brest, à l'hiver 1757-1758, 2 171 marins moururent en l'espace de quatre mois. Cependant, malgré la supériorité de la marine anglaise, des vaisseaux de ravitaillement atteignirent Québec, chaque année, jusqu'en 1760, alors que la ville était déjà tombée aux mains de l'armée de Wolfe.

Lorsque débutèrent les hostilités les Français disposaient en Amérique du Nord, de trois forces militaires distinctes : les troupes de la Marine, la milice et les indiens (Micmacs, Abénaquis, Outaouais, Algonquins, Loups). Les Anglais, n'en avaient presque aucuns.

En 1754, lorsque le gouvernement anglais décida de se lancer à l'assaut de la Nouvelle-France, sans passer par les formalités d'une déclaration de guerre en règle, il détacha deux bataillons de troupes régulières en Amérique. Pour parer à cette menace, la France se devait de renforcer ses unités à Louisbourg et au Canada. De sérieux problèmes d'ordre administratif et militaire s'élevèrent. Les colonies dépendaient du ministre de la Marine, mais l'importance numérique des troupes de la Marine ne pouvaient être accrue assez vite pour faire face à la nouvelle situation. Il fallu recourir aux régiments réguliers de l'armée française, qu'on appelait troupes de terre parce que la plupart des régiments empruntaient le nom de la province de France qui leur fournissait les hommes ; ces régiments étaient sous l'autorité du ministre de la Guerre. Une vive hostilité marquait les rapports entre ces deux ministères. En outre, c'est le gouverneur de la Nouvelle-France, toujours un officier de la Marine, qui occupait la fonction de commandant en chef de toutes les forces françaises en Amérique du Nord, tant à Louisbourg qu'au Canada ou en Louisiane. Le conseil des ministres s'accorda cependant pour reconnaître qu'à cette distance du siège de l'autorité, l'unité de commandement était essentielle. On convint d'accorder le renfort de 6 bataillons, en tout 3600 soldats et officiers qui passeraient sous l'autorité de la Marine.

Deux bataillons, ceux d'Artois et de Bourgogne, débarquèrent à Louisbourg. Les quatre autres furent cantonnés au Canada. Cependant, il fallut constituer un état-major pour les bataillons au service au Canada. Le baron Jean-Armand de Dieskau  accepta la charge de commandant avec le grade de maréchal de camp. Bon nombre d'officiers français trouvaient les opérations militaires dans les régions sauvages d'Amérique du Nord loin d'être à leur goût. Beaucoup souffraient des nuées de moustiques et de mouches au point d'en devenir malades ou presque fous.


LA GUERRE DE SEPT ANS marque le début d'une nouvelle ère dans l'histoire des guerres en Amérique du Nord, et cette ère est caractérisée par une intervention à grande échelle des forces armées régulières européennes. Du côté anglais, en particulier, il y eut un vaste déploiement de puissance militaire en Amérique qui devenait, pour la première fois, la scène principale des opérations militaires britanniques. Au cours de l'année fatidique de 1759, pas moins de 23 bataillons de l'infanterie régulière anglaise étaient en service sur le continent nord-américain tandis qu'on n'en comptait que six en Allemagne. A mesure que se déroula la guerre, une vaste et complexe machine militaire fut mise au point par l'Angleterre en Amérique. Ce sont les troupes régulières d'Angleterre qui jouèrent le rôle capital lors des opérations militaires anglaises en Amérique au cours de la guerre de Sept Ans.

Il ressort que la victoire de l'Angleterre en Amérique fut le fait de sa suprématie sur mer. Le nombre de vaisseaux de ligne de la marine royale anglaise était presque le double de celui des vaisseaux battant pavillon français. Le gros de sa flotte était retenu en Europe pendant toute la guerre. Les Français estimaient que leur meilleure stratégie était de porter un coup à l'Angleterre elle-même ; une telle invasion fut précisément envisagée en 1759.

La réussite anglaise en Amérique était subordonnée au maintien de sa supériorité navale générale dans l'Atlantique Nord et la meilleure façon d'y parvenir était de faire le blocus de la flotte française dans ses ports et de l'amener à combattre si elle s'aventurait à les quitter. La maîtrise des mers par l'Angleterre était si totale qu'en 1748 ni la France ni l'Espagne ne furent en mesure d'organiser une contre-attaque de quelque efficacité.

 

Le combat du Fort Necessity (3 juillet 1754)

La guerre était à peine terminée en Europe, en 1748, qu'un conflit éclata en Amérique du Nord au sujet de la vallée de l'Ohio. Les trafiquants de fourrures des colonies anglaises s'étaient infiltrés dans la région et les Virginiens qui spéculaient sur les terres revendiquaient ce territoire. La France contesta ces prétentions, chassa les commerçants américains et, en 1753 entreprit la construction d'une série de forts qu'elle échelonna depuis le sud du lac Érié jusqu'à la rivière Ohio. En 1754, au moment où la tension montait dans la vallée de l'Ohio, la France étant décidée à contester les réclamations territoriales de la Virginie, le gouverneur Duquesne[62] dépêcha des troupes supplémentaires aux forts récemment construits entre le lac Érié et l'embranchement de la rivière Ohio. Le gouverneur de la Virginie, Robert Dinwiddie, délégua un officier de la milice coloniale, George Washington, pour aller intimer aux Français l'ordre d'évacuer le territoire. On lui opposa une fin de non recevoir polie mais ferme. Les Français construisirent ensuite le fort Duquesne à l'endroit où se trouve maintenant Pittsburgh; ce fort assurait la suprématie militaire sur la région. Au printemps de 1754, Washington fut envoyé de nouveau dans l'Ohio avec des troupes de la milice coloniale afin d'affirmer la souveraineté britannique par la force, si nécessaire, nonobstant le fait que la paix régnait entre la France et l'Angleterre.

Commencent alors les hostilités qui conduiront à la Guerre de Sept Ans. Le commandant du fort Duquesne, Claude-Pierre Pécaudy de Contrecoeur, avait reçu l'ordre strict d'éviter la guerre avec les Américains mais de défendre ses positions en cas d'attaque. Mis au courant de l'approche d'un détachement américain qu'on disait considérable, il envoya Joseph Coulon de Villiers de Jumonville le 23 mai 1754, avec quelque 300 hommes, reconnaître si Washington avait réellement envahi le territoire que la France réclamait pour sien. Si tel était le cas, il devait en avertir le fort, puis sommer formellement Washington de se retirer. Son petit détachement était en fait une ambassade, semblable à celle de Washington envoyée au-devant de Jacques Legardeur de Saint-Pierre, l'année précédente, et il négligea de poster des sentinelles autour de son campement. Au lever du jour, le 28 mai 1754, Washington et 40 hommes fondirent sur le camp français établi près de l'endroit où s'élève maintenant JUMONVILLE en Pennsylvanie. Certains des hommes dormaient encore, Washington donna l'ordre de tirer. Les Canadiens qui réussirent à échapper à la rafale, se jetèrent sur leurs armes mais ils furent rapidement réduits à l'impuissance. Les Français soutinrent par la suite que Jumonville fut abattu pendant qu'il signifiait sa mise en demeure officielle. 10 Canadiens furent tués; un fut blessé et les autres, à l'exception d'un, faits prisonniers. George Washington et ses hommes se retirèrent abandonnant aux loups les cadavres de leurs victimes. Horace Walpole, 4e comte d'Arford, célèbre homme d'Etat anglais, a décrit comme "une volée tirée par un jeune Virginien dans les forêts lointaines de l'Amérique, et qui embrasa le monde".Ce coup de feu allait marquer le début de la guerre de Sept Ans. Hostilités qui allaient s'étendre à quatre continents pendant les neufs années suivantes.


Louis Coulon (Officier dans les troupes de la Marine, né à Verchères (Québec) le 10 août 1710,  épousa à Montréal le 29 décembre 1753 Marie Amable Prudhomme) avait prit le commandement d'une troupe constituée de 600 Canadiens et de plus de 100 Indiens. A son arrivée au fort Duquesne (Pittsburgh, Penn) le 26 juin 1754, il apprit que même si l'Angleterre et la France n'étaient pas en guerre, un détachement de près de 30 Canadiens conduit par son frère Joseph Coulon de Villiers de Jumonville, avait été attiré dans une embuscade par un détachement de la milice de Virginie dirigé par George Washington. Jumonville et 9 autres Canadiens avaient été tués ; les autres, à l'exception d'un seul, avaient été capturés. Le commandant du fort Duquesne, Claude-Pierre Pécaudy de Contrecoeur, avait rassemblé 500 membres de sa garnison afin de venger cette attaque et de chasser les Américains du territoire réclamé par la France. Louis Coulon reçut le commandement de ce détachement, tel qu'il l'avait demandé. Deux jours plus tard, la troupe quitta le fort Duquesne. En route, ils passèrent à l'endroit où le petit détachement de Jumonville était tombé dans l'embuscade. Washington y avait abandonné, sans sépulture, les cadavres scalpés qui servaient de proie aux loups et aux corneilles[63].

Le 3 juillet 1754, les Canadiens entrèrent en contact avec l'ennemi qui s'était réfugié dans une grossière redoute en rondins, fort Necessity (près de Farmington, Penn). Le moral et la discipline des miliciens américains étaient bas et ils craignaient les Canadiens. Pendant neuf heures les forces canadiennes accablèrent l'ennemi d'un feu nourri, leur infligeant une centaine de pertes, soit le quart de leurs effectifs. A la tombée de la nuit, les pertes de Coulon ne s'élevaient qu'à 3 morts et 17 blessés, mais ses hommes étaient épuisés, la poudre et les projectiles commençaient à manquer. Il décida de parlementer. Washington accéda rapidement à sa demande. Coulon rédigea les articles de la capitulation, déclarant que les Français n'avaient aucunement l'intention de perturber la paix entre les deux royaumes; ils voulaient seulement : " venger l'assassin qui a été fait sur un de [leurs] officiers porteur d'une sommation, et sur son escorte comme aussy d'empecher aucun Etablissement sur Les terres du Roy mon Maitres". Les Américains reçurent la permission de retourner en sécurité dans leur pays avec les honneurs de la guerre, à la condition qu'ils promettent de quitter leurs établissements situés à l'ouest des Alleghanys pendant les douze mois qui suivraient. Ils acceptaient de renvoyer au fort Duquesne dans un délai de deux mois et demi, les prisonniers capturés lors de leur attaque contre la troupe de Jumonville. Pour montrer leur volonté de respecter les clauses de la capitulation, ils présentèrent deux otages, Robert Stobo et leur interprète Jacob van Braam.  Les Archives Nationales du Québec possèdent la capitulation accordée par Louis Coulon  à George Washington (3 juillet 1754, 3 pages).

Le jour suivant, les Américains s'enfuirent si rapidement que Washington laissa son journal parmi les bagages abandonnés. Le gouvernement français utilisa abondamment son contenu, ainsi que celui des articles de la capitulation pour taxer les Anglais d'assassins et d'agresseurs avoués. Washington nia s'être sciemment avoué coupable de meurtre. De concert avec ses collègues officiers, il soutint que leur interprète, en traduisant l'acte, avait substitué les mots "morts" ou "perte de" au terme incriminant d' "assassin". Les Américains, toutefois, déclarèrent ouvertement par la suite qu'ils n'avaient aucune intention de respecter le document auquel Washington avait apposé sa signature. Les prisonniers ne furent pas relâchés et, avant la fin de l'année stipulée dans l'acte, Washington accompagna l'armée du major général Édouard Braddock dans un assaut majeur contre le fort Duquesne.

Dans son rapport au ministre de la Marine, le gouverneur Duquesne louangera non seulement la valeur de Coulon de Villiers, mais aussi la retenue dont il avait fait preuve en épargnant la vie des Américains, malgré l'amer ressentiment qu'il avait dû éprouver à la suite de l'assassinat de son frère.

 

La bataille de la Monongahéla (9 juillet 1755)[64]

Au début de 1755, le général Édouard Braddock, commandant en chef en Amérique du Nord, fit voile vers l'Amérique avec des ordres précis du duc de Cumberland, commandant en chef de l'armée, visant à mettre fin aux "empiétements" français. Braddock avait la permission d'entreprendre simultanément diverses opérations contre les Français, si ses troupes étaient en nombre suffisant.

Les troupes françaises commandées au tout début par Daniel-Hyacinthe-Marie Liénard[65] remportèrent l'importante bataille sur la rivière Monongahéla (à trois lieues du fort Duquesne) contre l'avant-garde anglaise de 1500 hommes d'Édouard Braddock. Il avait sous ses ordres 637 Indiens, 146 miliciens canadiens et 108 officiers et soldats des troupes de la Marine. Dès le début de 1755, on avait appris des détails inquiétants de la bouche d'un déserteur ennemi: 3000 soldats anglais et américains, sous les ordres d'Édouard Braddock, se dirigeaient vers le fort Duquesne, armés d'une bonne dizaine de canons de 18 livres. Il est intéressant de noter ici que Benjamin Franklin alors maître général des Postes (charge la plus ancienne en Amérique, dépendant de la Couronne britannique), travailla pour les Britanniques en fournissant des transports (chariots, chevaux, beurre, jambons, sucre) pour cette malheureuse expédition contre le Fort Duquesne.

 Liénard ayant été tué durant ce combat, Jean-Daniel Dumas (Voir partie II : Correspondance de Charles de Rohan à Monsieur Desprez) se vit alors confier le commandement des forces et mit en déroute les troupes anglaise, beaucoup plus nombreuses. Braddock fut également tué. Le chef de guerre des Outaouais de Détroit, Pontiac, aurait été au nombre des quelque 800 à 1000 Indiens qui, avec Jean-Daniel Dumas infligea la terrible défaite aux Anglais. George Washington, aide de camp civil de Braddock, participa à ce combat.

La part de Thomas Gage au désastre qui s'abattit sur l'armée de Braddock suscita certaines controverses. Braddock fut blessé en essayant de reformer son armée débandée. Une balle lui passa à travers le bras droit et se logea dans le corps. Ses officiers eurent d'énormes difficultés à le sortir du champ de bataille. Il mourut le 13 juillet à un endroit appelé Great Meadows. Ses dernières paroles furent : "We shall know better how to deal with them next time" (Nous saurons mieux comment les battre la prochaine fois). Derrière eux, les Anglais laissèrent en outre un chariot particulièrement important contenant les papiers de Braddock, et parmi eux, ses instructions secrètes touchant l'attaque du Canada français. Le capitaine Robert Orme, de l'état major de Braddock, attribua le désastre de cette expédition à l'effondrement de l'avant-garde de Gage, de même qu'à "une façon de combattre" inhabituelle pour les soldats. Répondant à une demande de renseignements de William Shirley, le nouveau commandant en chef par intérim, Gage et Thomas Dunbar, les deux commandants de régiments, prétendirent que le moral des troupes était bas, en partie à cause de l'influence des "troupes provinciales et des gens du pays", qui leur avaient dit que, "s'ils combattaient les Indiens à la manière européenne, ils seraient battus". Ils soulignaient aussi le manque de troupes légères ainsi que "la nouveauté que représentait un ennemi invisible et la nature de ce pays, qui est tout en forêts". Cette victoire consolida les intérêts français dans l'Ohio pour encore quelques années. Charlotte Daneau de Muy, dite soeur de Sainte-Hélène, annaliste des Ursulines de Québec traduit bien l'événement de cette bataille : "jamais la main de Dieu n'a paru plus visiblement pour abattre l'orgueil d'un nouvel Holopherne dans la personne du général [Édouard Braddock] qui comptait déjeuner à la Belle Rivière, dîner à Niagara et souper à Montréal. Il perdit la vie et la plus grande partie de son armée".

L'excellent film américain produit par Michael Mann en 1992, Le Dernier des Mohicans, de l'écrivain  James Fenimore Cooper a très bien reproduit l'ambiance de cette période.

 

Montcalm et la bataille de Carillon (8 juillet 1758)

Louis Joseph de Montcalm, marquis de Montcalm, lieutenant général des armées en Nouvelle-France était né au château de Candiac, près de Nîmes le 28 février 1712, mort à Québec le 14 septembre 1759.

Il servit en Rhénanie dans les armées commandées par le maréchal Maurice de Saxe et le maréchal duc de Berwick. Le 3 octobre 1736 il épousa Angélique Louise Talon (fille d'Omer Talon, colonel du régiment d'Orléans et de Marie-Louise Molé). A l'âge de neuf ans, le 16 août 1721, il reçut une commission d'enseigne dans le régiment de Hainaut. Au moment où éclata la guerre de Succession d'Autriche, Montcalm, aide de camp du lieutenant général marquis de La Fare, fut blessé pendant qu'il subissait le siège à Prague avec l'armée du maréchal de Belle-Isle (Louis Charles Auguste Fouquet (1684-1761), duc de Belle-Isle. Ministre de la Guerre de 1758 à 1761). Nous avons ici une preuve que le seigneur du Biez connaissait bien le marquis de Montcalm, puisque Charles de Rohan était aide de camp de ce maréchal de Belle-Isle dans l'armée de Bohème. Il était également à ce siège de Prague.

Au cours d'un engagement, le 8 septembre 1755, Dieskau, le commandant des troupes régulières françaises, avait été fait prisonnier. Pour remplaçant on choisit Moncalm. Le 11 mars 1756, il fut nommé maréchal de camp. La commission de Montcalm et les instructions qui l'accompagnaient spécifiaient que le gouverneur général, Pierre Rigaud de Vaudreuil avait le commandement de toutes les forces armées de la colonie et que Montcalm lui était subordonné en tout. Montcalm prit congé du roi le 14 mars 1756 et partit pour Brest en compagnie du colonel Bougainville qui faisait partie de son état-major. Ils mirent à la voile le 3 avril et ils arrivèrent le 13 mai à Québec. Il se rendit ensuite à Montréal pour se présenter au gouverneur général. Au début de 1757, pendant que les Anglais se préparaient à mettre le siège devant Louisbourg, Vaudreuil élaborait des plans pour attaquer les positions anglaises au sud du Lac Champlain. En juillet, après l'arrivée des vaisseaux apportant des ravitaillements de France, Montcalm réunit à Carillon (Ticonderoga, New York) 6200 hommes réguliers et militaires. Il y avait 1800 indiens avec eux.

A l'extrémité sud du lac Saint-Sacrement (Lac George, N.Y.) le major général James Abercromby avait massé la plus grosse armée jamais réunie en Amérique du Nord, soit plus de 6000 soldats de troupes régulières anglaises et 9.000 hommes de troupes provinciales. Le 5 juillet 1758 l'armée s'ébranla vers le nord du lac.

Le 8 juillet 1758, Abercromby effectua une rapide inspection de l'emplacement ; croyant que Moncalm était sur le point de recevoir 3000 hommes de renfort, il décida d'attaquer sur-le-champ sans attendre l'artillerie. Un peu avant midi, le 8 juillet, les troupes régulières anglaises se formèrent en quatre colonnes, et on se lança à l'attaque des abattis français. Les formations furent rapidement rompues lorsqu'elles tentèrent de se frayer un chemin à travers le fouillis de troncs d'arbres et de branchages. Un feu nourrit de mousquet les désorganisa avant qu'elles n'atteignissent les lignes françaises. Les rangs se reformaient, remontaient à l'assaut pour être repoussés à chaque tentative avec de lourdes pertes. Les Français sautèrent alors la barricade et pourchassèrent les tirailleurs qui restaient encore. Toute l'armée tourna les talons et s'enfuit en désordre, laissant sur place armes, munitions et blessés. Ce fut  pour Montcalm une glorieuse victoire.

 

La bataille des Cardinaux (20 novembre 1759)

Tragédie navale peu connue. L'une des relations la mieux documentée est Pierre de la Condamine, "La bataille des cardinaux", Cahiers des Amis de Guérande, 1972.  -  A.N. Marine et Colonies, Série B4 87 et 88, Angleterre : Côtes de France : combat des cardinaux.

En 1759, le comte Hubert de Brienne-Conflans, Maréchal de France armait péniblement à Brest une escadre pour protéger un éventuel débarquement en Angleterre. Le 20 novembre cette escadre de 21 vaisseaux se heurta, à l'entrée de la baie de Quiberon, aux 23 bâtiments britanniques commandés par Édouard Hawke. Signalons aux côtés de Hawke la présence d'Auguste Keppel, 2ième fils de William Anne (2e comte d'Albemarle), officier naval éminent, premier lord de l'Amirauté, amiral de l'escadre bleue en 1778. Guy François  de Coëtnempren de Kersaint [66]  trouva la mort dans ce désastreux combat livré par le maréchal de Conflans. L'amiral Hawke, qui avait coupé la ligne française, se dirigeait sur le vaisseau amiral, le Soleil Rouge. Kersaint, manoeuvrant pour empêcher Hawke de joindre ce vaisseau, reçut sa bordée et lui riposta de la sienne ; mais les sabords de sa première batterie étant restés ouvertes, le Thesée, dans un virement de bord fut englouti avec son commandant et les 600 hommes de son équipage, à l'exception de 22, qui purent se sauver à la nage à la côte du Croisic.

 

De façon générale, les Anglais ont joui sur mer d'une supériorité indiscutable tout au long de la guerre de Sept Ans. Cependant, l'exception la plus frappante est bien le cas de Louisbourg, en 1757, lorsque les Français réussirent à y concentrer une escadre quelque peu supérieure à celle dont disposait le contre-amiral Francis Holburne pour l'attaque qu'on projetait contre la forteresse. L'année suivante, l'amiral Édouard Boscawen, qui soutenait avec sa flotte, l'expédition de Jeffery Amherst contre Louisbourg, disposait d'une telle supériorité que l'escadre française dans le port ne se risqua pas à relever le défi.

La formation navale anglaise la plus considérable à participer aux opérations en Nouvelle-France fut celle commandée par Charles Saunders[67], qui transporta et appuya l'expédition de Wolfe contre Québec en 1759. La flotte de Saunders comprenait trois de ces rares bâtiments à trois ponts qui servaient de vaisseau amiral ou de point d'appui pour les lignes de combat. Tout comme dans l'armée de Wolfe, les officiers de Saunders étaient d'une compétence professionnelle hors pair. La charge de commandant des forces armées en Amérique, instaurée avec l'arrivée d'Édouard Braddock en 1755, fut maintenue pratiquement sans interruption jusqu'au retrait des troupes impériales de Halifax en 1905-1906. Au cours de la guerre de Sept Ans, le poste fut occupé successivement par Braddock, Shirley, Lord Loudoun[68], James Abercromby et Jeffery Amherst.

Voici les personnages reliés à la bataille de Fontenoy.

Nous étudierons la composition au complet de cet état-major britannique situé au château de Briffoeil dans un prochain article et analyserons les tristes événements qui s'y déroulèrent les heures suivantes après la bataille. L'équipe qui accompagna Cumberland à Briffoeil avait été soigneusement choisie.

Jeffery AMHERST (1717-1797) : Ier baron Amherst, officier né le 29 janvier 1717 à Riverhead, Sevenoaks, Angleterre, mort  le 3 août 1797 près de Sevenoaks. Fils de Jeffery Amherst, barrister prospère dont la famille avait vécu dans le Kent pendant des siècles et d'Elizabeth Kerrill. Il participa aux batailles de Dettingen en 1743 et de Fontenoy en 1745. Se trouva dans l'état-major de Cumberland au château de Briffoeil. Le Duc de Cumberland fit d'Amherst en 1747 l'un de ses aides de camp. Le 9 novembre 1758, il y apprit que la défaite d'Abercromby à la bataille de Carillon avait provoqué le rappel de ce général, tandis que le succès qu'il avait lui-même obtenu à Louisbourg lui avait mérité le poste de commandant en chef pour l'Amérique. Il partit alors pour New York, où il passa l'hiver à faire des plans et des arrangements logistiques en vue de la campagne de 1759. Pour Amherst, il était évident qu'il fallait effectuer une double attaque contre le Canada.Il est nécessaire, écrivait-il, en janvier, à lord George Sackville, "de frapper au coeur, et il n'y a que deux routes pour y arriver, l'une remontant le Saint-Laurent jusqu'à Québec, et l'autre en passant par Ticonderogapour atteindre Montréal; nous devons prendre les deux à la fois, pour être sûrs de réussir grâce à l'une d'elles, et quelle que soit celle qui réussira, l'affaire est dans le sac". A Londres, Pitt et Ligonier en étaient arrivés à la même conclusion, et Wolfe, qui était rentré en Angleterre, fut nommé commandant de l'expédition qui devait remonter le Saint-Laurent. Bien que subordonné, officiellement, à Amherst, le commandement de Wolfe allait être en pratique indépendant, vu l'impossibilité virtuelle de communiquer avec le commandant en chef. Le 29 décembre 1758, Pitt adressa à Amherst des ordres détaillés. On y consacrait beaucoup d'attention à l'entreprise de Wolf et aux mesures à prendre pour sa préparation. Montréal, et le Canada tout entier avec elle, capitula entre les mains d'Amherst le 8 septembre 1760. Sir John William Fortescue a dit de lui: "Il fut le plus grand administrateur militaire produit par l'Angleterre depuis la mort de Marlborough et il l'est demeuré jusqu'à l'arrivée de Wellington".

 

Edouard CORNWALLIS (1713-1776) : Famille aux relations influentes. Fils de Charles Cornwallis, 4ème baron Cornwallis et de Charlotte Butler. Administrateur colonial et fondateur de Halifax. Commandant à Fontenoy du 20e régiment d'infanterie. Cornwallis participa ensuite à la "pacification" de l'Écosse, y compris au quasi-massacre de Culloden. Gouverneur de Gibraltar en 1762. Marié en 1763 à Mary, fille de Charles, 2e vicomte Townshend. Charles Cornwallis, celui qui fut coincé dans Yorktown en 1781, était son neveu.

 

Michel LE COURTOIS de Surlaville (1714-1796) : Né à Bayeux le 17 juillet 1714, fils de Thomas Le Courtois, avocat et de Charlotte Le Blais. Capitaine, participa à la bataille de Fontenoy où sa vaillante conduite à la tête de la brigade de La Couronne lui valut la croix de Saint Louis. Au siège de Tournai en 1746 il dirigea une sortie de la forteresse. Reçut du Maréchal Maurice de Saxe le commandement du village de Tubize en 1747. Major des troupes de Louisbourg le 1 avril 1751 et ensuite commandant de la forteresse. En mars 1757, il fut nommé aide-major général de l'infanterie dans l'armée du Bas-Rhin. Jusqu'à la chute de Louisbourg en 1758, il continua de correspondre avec des collègues officiers en Acadie. Brigadier en 1761, Surlaville servit de nouveau en Allemagne et en 1762 obtint le grade de maréchal de camp. De 1763 à 1771 il servit en Picardie et en Boulonnais. Mort célibataire à Paris le 8 janvier 1796.

 

Jean-Armand DE  DIESKAU (1701-1767) : Officier, gouverneur de Brest, commandant des troupes régulières françaises au Canada, né en 1701 en Saxe, décédé en 1767 à Suresnes. Protégé du Maréchal de Saxe. Dieskau fut amené en France en 1720 par son compatriote comme aide de camp et servit sous ses ordres dans différentes campagnes de 1733 à 1744. Il fut promu colonel de cavalerie et combattit  à ce titre à Fontenoy ; en 1747 il fut nommé maréchal de camp et gouverneur militaire de Brest, la plus importante base navale française sur l'Atlantique. Il arriva à Québec en juin 1755. Ses pouvoirs étaient étendus mais non absolus car, en vertu de ses instructions, il était placé sous les ordres du gouverneur général Pierre de Rigaud de Vaudreuil. De ce fait, son rôle se limitait à dirigeait les opérations militaires ; il était responsable de la tactique mais non de la stratégie.

 

Charles HAY (1705-1760) : Fils de Charles Hay, marquis de Tweeddale et de lady Susannah Hamilton.  Lieutenant-colonel de la King's Company dans les Grenadiers Guards. Membre du Parlement, il était un adversaire de la politique de sir Robert Walpole. Il commanda cette compagnie à Dettingen en 1743. Il fut impliqué à Fontenoy dans le fameux épisode rendu célèbre par Voltaire. Au cours de la bataille tandis qu'il franchissait le sommet d'une colline à la tête de ses hommes à travers un tir d'artillerie meurtrier, Hay se trouva soudain face à face avec les gardes français et suisses rangés en masse. Il rapporta plus tard qu'il avait pris sa gourde pour boire à la santé de l'ennemi et qu'il l'avait apostrophé en ces termes : "Messieurs, j'espère qu'aujourd'hui vous allez nous attendre et que vous n'allez traverser le Scheldt à la nage comme vous avez traversé le Mein à Dettingen". D'après Voltaire[69], le commandant français aurait ainsi répondu à Hay qui le sommait d'ouvrir le feu : "Messieurs, nous ne tirerons jamais les premiers, tirez vous-mêmes". Le récit authentique est celui donné par Sir Frederick William Hamilton dans son Origin and History of the First or Grenadier Guards, vol.II, ch.XV. Il confirme la version de Charles Hay. John Manchip White dans son ouvrage Maurice de Saxe, maréchal de France 1696-1750,  publié chez Perrin en 1967, confirme aussi la version de Charles Hay. L'histoire célèbre de cet épisode romantique relatant les échanges polis entre officiers popularisé par Voltaire est apocryphe. En 1746 on disait que Hay était dans un asile. Nommé  en 1749 aide de camp de George II. En 1757 ses officiers pensèrent qu'il était devenu fou, et il fut séquestré pendant 7 mois. Hay assista en 1758 au siège de la forteresse de Louisbourg à bord du Dublin. Mort célibataire à Londres le 1 mai 1760.

 

John PARR (1725-1791)  : Né à Dublin le 20 décembre 1725. Fils de John Parr et d'Eleonor Clements. Officier et administrateur colonial. Se trouva sur le champs de bataille à Fontenoy. Grièvement blessé en 1759 à la sanglante bataille de Minden (Allemagne) durant la guerre de Sept Ans. De 1763 à 1770, en garnison à Gibraltar. En 1778 on le trouve major de la Tour de Londres. Nommé en 1782 gouverneur de la Nouvelle-Écosse à Halifax en remplacement de Françis Legge. Décédé le 25 novembre 1791 à Halifax.

 

Robert MONCKTON (1726-1782) : Né le 24 juin 1726 dans le Yorkshire, fils de John Monckton Ier vicomte Galway et de lady Elizabeth Manners. Monckton combattit à Dettingen. Capitaine, il combattit à Fontenoy. Nommé à Lessines aide-de-camp de Lord Dunmore le 8 mai 1745 (vieux style). Joua un rôle important dans la prise de Québec. Le 13 septembre 1759, Monckton dirigea le débarquement à l'anse au Foulon, et, plus tard dans la journée, il commanda l'aile droite de l'armée britannique sur les plaines d'Abraham. Nommé Gouverneur et commandant en chef de la province de New York le 20 mars 1761 jusqu'au 14 juin 1765. Considéré comme "un ami de l'Amérique". Gouverneur de Portsmouth après 1778. Décédé à Londres le 21 mai 1782. Inhumé en l'église St Mary Abbot à Kensington. Ne fut jamais marié.

 

Charles LAWRENCE (1709-1760) : Parent avec les Montagu il jouissait de la protection du comte de Halifax, président du Board of Trade. Officier, gouverneur de la Nouvelle-Écosse à Halifax en juillet 1756. Capitaine, il fut blessé en 1745 à Fontenoy alors qu'il combattit avec le 54e régiment. Aida à préparer les forces britanniques en vue des opérations contre Québec en 1759. Des historiens l'ont condamné pour son manque d'humanité envers les Acadiens (Déportation). Décédé à Halifax le 19 octobre 1760.

 

John FORBES (1707-1759) : Officier, né le 5 septembre 1707 à Edimbourg, Écosse. A la bataille de Fontenoy en mai 1745, il servit en qualité de capitaine et d'aide de camp de James Campbell, commandant de la cavalerie britannique. Forbes se trouva dans l'état-major au château de Briffoeil. George Townshend dans son journal (diary) mentionne :"on the right of the British, the Bois de Barry, in which Colonel Forbes,Deputy Quartermaster General, an active and very intelligent officer, had observed the French posted with a preparation of flanking artillery to gall the right of our ligne, and he solicited a force to dislodge them on its approach". Il fut la même année, promu major et lieutenant-colonel de l'armée. Il participa en 1745 à la répression du soulèvement en Écosse et prit part à la bataille de Culloden. Il servit de nouveau dans les Flandres en qualité d'aide de camp de sir John Ligonier, lors de la désastreuse défaite de Lawfeld (Belgique), le 2 juillet 1747. L'année suivante, il devint quartier-maître général dans l'état-major personnel du duc de Cumberland et en 1750 il fut promu lieutenent-colonel dans les Scots Greys. Forbes arriva à Halifax en été 1757 en qualité de colonel du 17e régiment d'infanterie et de chef d'état-major pour lord Loudoun (John Campbell). Il fut promu général de brigade le 28 décembre 1757 et en mars 1758, on lui confia son premier commandement autonome, l'expédition pour prendre le fort Duquesne (Pittsburgh, Penn.). Cette même mission, trois ans plus tôt, avait mené à la catastrophe de l'armée de 2500 hommes sous les ordres d'Édouard Braddock. Le 24 novembre 1758, Forbes prit possession du fort et le nomma fort Pitt (appelé par après Pittsburgh). George Washington,  qui était sous les ordres de Forbes, prit une part active dans la capture du fort Duquesne avec son régiment de Virginie. Par sa prudence, sa conscience professionnelle et sa ténacité, Forbes avait réussi à mettre la région supérieure de l'Ohio sous la domination anglaise. Forbes mourut célibataire à Philadelphie le 11 mars 1759 à 51 ans. Il fut inhumé dans le choeur de Christ Church à Philadelphie.

 

George TOWNSHEND (1723-1807)[70] : Décédé le 14 septembre 1807 à Raynham Hall, Norfolk. Fils de Charles, 3e vicomte Townshend et d'Audrey Harrison. Les Townshend avaient de grandes propriétés dans le Norfolk. Il s'engagea comme volontaire dans l'armée britannique qui combattit en Allemagne attaché à l'état-major de lord Dunmore. Participa le 16 avril 1743 à la bataille de Dettingen. Se trouva à Fontenoy. Nommé à Lessines aide de camp de Lord Dunmore le 8 mai 1745 (vieux style). Devint aide de camp du duc de Cumberland et prit part à la bataille de Lawfeld  le 21 juin 1747. Député de Norfolk à la Chambre des Communes. Devient lieutenant-colonel dans l'armée. A la fin de la guerre de la Succession d'Autriche en 1748 il retourna en Angleterre. Il se brouilla avec Cumberland, l'attaqua au Parlement et en fit une tête de Turc grâce à ses talents remarquables de caricaturiste. En décembre 1758, il fut mandé à Londres et nommé commandant d'une brigade qui devait participer à une expédition sous le commandement de James Wolfe, pour attaquer Québec par le fleuve Saint-Laurent. Les 9 et 10 juillet 1759, les brigades de Townshend et de Murray débarquèrent sur la rive nord du Saint-Laurent au pied de la chute Montmorency où ils se retranchèrent.

A la bataille des plaines d'Abraham, Townshend commandait l'aile gauche de l'armée britannique. Wolfe fut blessé mortellement et Monckton subit de graves blessures, ce qui permit à Townshend, qui ne s'y attendait pas, de se retrouver à la tête de l'armée.  Townshend se prépara à assiéger et à bombarder Québec, grâce à un grand nombre de canons qu'il fit hisser sur les plaines d'Abraham par la falaise. Mais la ville capitula le 18 septembre. Il avait offert des conditions relativement avantageuses de façon à pouvoir en prendre possession le plus rapidement possible. On laissa le commandement de Québec à Murray, et Townshend retourna en Angleterre. Le 6 mars 1761, il prit le commandement d'une brigade dans le contingent britannique de l'armée des alliés en Allemagne. Le 15 et 16 juillet sa brigade fut au coeur de la bataille de Wellinghausen (Voir : 1.Biographie de Charles de Rohan). En 1767, il fut nommé lord-lieutenant d'Irlande. De 1772 à 1782 il fût maître général du Board of Ordnance. Promu général en 1782 et maréchal en 1796. Gouverneur de Jersey.  Après la mort de sa femme, Charlotte Compton, il se remaria à Anne Montgomery, fille de sir James William Montgomery.

 

James WOLFE (1727-1759) : Officier, commandant de l'expédition britannique qui s'empara de Québec en 1759, né à Westerham (Kent) le 2 janvier 1727, décédé le 13 septembre 1759 à la suite des blessures reçues lors de la bataille des plaines d'Abraham. Son corps fut ramené en Angleterre et enterré près de son père à Greenwich (Eglise St Alfege). Participa à la bataille de Dettingen ( 1743) comme enseigne dans le régiment de Duroure. A ce jour, la présence à Fontenoy de James Wolfe n'est  pas prouvée. Le 4 mai 1745 il semblerait être présent dans le régiment de Barrels (4th d'Artillerie) alors stationné à Gand. Un des régiments qui a souffert le plus à Fontenoy en pertes de vies humaines fut le régiment de Duroure. C'est le 12 juin 1745 qu'on trouve sa nomination comme Brigade-Major dans le régiment de Barrels, signée "William", est datée "Lessines, June 12th, 1745". Présent à la bataille de Culloden (16 avril 1746). Fut alors promu major dans le régiment de Bligh. Le 2 juillet 1747 il fut blessé à la bataille de Lawfeld (petit village belge près de Maëstricht). Il y fut remercié personnellement sur le champ par le duc de Cumberland qui le nomma lieutenant-Colonel. William Pitt reconnu sa valeur et lui donna en 1758 le rang de général de brigade sous Amherst dans l'expédition contre le Cap Breton. Les Archives Nationales du Québec possèdent une lettre du marquis de Moncalm à James Wolfe (1759, 1 page) ou il lui recommande de bien traiter les blessés ! !

 

Thomas GAGE  : Né vers 1720, deuxième fils de Thomas Gage, 1er vicomte Gage dans la pairie irlandaise et de Benedicte Marie Thérèse Hall, décédé le 2 avril 1787 à Londres. Les Gage de Firle, dans le Sussex, étaient une vieille famille catholique. A Fontenoy, en 1745 il est aide de camp du comte d'Albemarle (William Anne Van Keppel,  2e comte d'Albemarle, fils d'Arnold Joost Van Keppel (1669-1718), baron Van Keppel, major général et Gouverneur de la ville de Tournai.). Lors de la prise de Montréal par Amherst, en 1760, Gage commandait l'arrière garde. En 1760, Amherst le nomma gouverneur militaire de Montréal. Nommé commandant en chef des forces de sa Majesté en Amérique du Nord 1764-1775, gouverneur du Massachusetts en 1774. Nommé gouverneur de Boston par George III. Il tenta le 19 avril 1775 de s'emparer du dépôt d'armes constitué par les insurgés dans la ville de Concord. L'opération se solda par un échec et donna le signal des hostilités de la guerre d'indépendance américaine. Gage fut relevé de son commandement et finit dans le commandement des forces défensives du Kent en 1781. Thomas Gage est le type d'officier que l'on rencontre généralement dans l'armée britannique du XVIIIe siècle. Sa réputation personnelle de commandant équitable, d'homme dévoué à sa famille et d'hôte aimable et charmant resta sans tâche. A Montréal, toutes ces qualités lui acquirent la réputation d'un gouverneur juste et compétent.

 

François Gaston, duc DE LÉVIS (1719-1787) : En 1741, il servit dans le corps français au sein de l'armée bavaroise qui envahit la Bohême et il participa à la prise puis à la défense de Prague (comme Soubise). Il combattit à Dettingen en 1743. De 1756 à 1760 commandant en second des troupes régulières françaises sous les ordres du marquis de Montcalm à l'armée du Canada (campagnes du Lac Saint-Sacrement, Fort Carillon, Québec, Montréal).

Le 24 mars 1761 William Pitt écrivait de Whitehall pour informer Lévis que Sa Majesté Britannique avait été heureuse de lui permettre de servir n'importe où en Europe. Deux semaines plus tard, le duc de Choiseul, ministre de la Guerre, l'informait qu'il servirait dans l'armée du Bas-Rhin, sous les ordres du prince de Soubise. Lévis commanda par la suite l'avant-garde du prince de Condé à la bataille de Nauheim / Johannisberg (Hesse). En 1765 il fut nommé gouverneur de l'Artois. Il reçut le bâton de maréchal de France le 13 juin 1783. Le duc de Lévis mourut à Arras le 26 novembre 1787. Un monument est érigé à sa mémoire dans la cathédrale d'Arras. Sa veuve Gabrielle Augustine Michel de Tharon et deux de ses trois filles furent moins heureuses : elles moururent le 10 juillet 1794 à Paris sur l'échafaud révolutionnaire juste quelques jours avant la chute de Robespierre.

Pour clore et conclure cet article je ne prétends pas avoir donné une biographie complète du prince de Soubise, loin de là. Les archives, papiers, documents ne manquent pas. Énormément de choses restent à découvrir. Avis aux jeunes chercheurs... Tout est soigneusement conservé aux Archives nationales de France, aux Archives des Affaires Étrangères,  au Service historique de l'armée de Terre à Vincennes. Sa haute naissance, son éducation, ses origines et son dévouement à Louis XV, à la France, font de lui un très grand personnage. Sa générosité semble avoir été très grande. De grandes qualités de coeur, de bonté et de fidélité envers les autres, également beaucoup de politesse. Il cultivait aussi les lettres et disposait après l'héritage du cardinal de Rohan, son frère, d'une des plus belles bibliothèques d'Europe. Dumouriez à raison lorsqu'il prétend que le prince de Soubise était le plus riche seigneur de la France, mais je pense que Dumouriez est injuste quant il le qualifie de "fléau national".

Mon but était  de faire connaître, d'éclaircir la politique extérieure et militaire de la France et de l'Angleterre en Amérique du Nord et en Allemagne entre 1745 (Fontenoy) à 1763 (Traité de Paris) en suivant la carrière de Soubise, seigneur du Biez. Le Traité de Paris mit fin à la guerre de conquête. La France cède tous ses territoires d'Amérique du Nord à l'Angleterre, sauf les îles de Saint-Pierre et Miquelon. Louis XV comprenait très bien et dominait les données du jeu européen mais les ministres de George II auraient mieux discernés les enjeux extra-européens d'un conflit dont les opérations s'étendaient jusqu'au Canada (l'expression de Pitt était "pour conquérir l'Amérique en Allemagne"). Cela m'a conduit involontairement jusque 1783 (Traité de Versailles qui reconnaît l'indépendance des 13 colonies formant les États-Unis). Le profit principal de la guerre de Sept ans fut pour l'Angleterre. Le trident de Neptune parut assuré, pour plusieurs siècles à la Grande-Bretagne. L'alliance entre l'Autriche et la France, qui étonna toute l'Europe et qu'on regarda comme un chef-d'oeuvre de politique, ne fut que l'effet d'un concours de circonstances amenées par un pur hasard. Jamais la France n'a désiré anéantir la puissance de la Prusse. Les vues principales de la cour de Versailles avaient l'Angleterre pour objet. La France désirait la conquête du pays d'Hanovre, afin d'effectuer en Amérique des desseins plus importants. L'alliance avec l'Autriche lui fournissait un prétexte pour faire entrer ses troupes en Allemagne.


Enfin, voici quelques précisions sur les deux dernières années de la carrière militaire du prince de Soubise lors de la guerre de Sept Ans en Allemagne[71]. Ce fut le 11 février 1761 que le Prince héréditaire Ferdinand de Brunswick se mit en marche sur quatre colonnes et attaqua de tous côtés les quartiers d'hivers des Français. Le 15 février 1761 eu lieu le sanglant combat de Langenfalze (=Langensalza, nord de Gotha) ou les Français furent battus et perdirent 5 000 hommes. Le 15 juillet 1761 eu lieu le combat de Hohenover entre Ferdinand de Brunswick et l'armée du prince de Broglie. La perte des Français dans ce combat fut de 5 000 hommes. Un détachement de l'armée de Soubise s'empara d'Osnabrück (Cercle de Westphalie) et traita cette ville de la manière la plus barbare, parce qu'elle était hors d'état de payer immédiatement une contribution prodigieuse. Dans toute l'Ostfrise mise à contribution quantité de braves paysans furent punis par la corde pour avoir pris la défense de leurs biens et de leurs foyers. Le 24 juin 1762 Ferdinand attaqua les Français près de Wilhelmstahl (nord de Kassel, Cercle supérieur du Rhin) et les repoussa jusque sous les murs de Kassel. Ils laissèrent sur le champ de bataille 4 000 morts et prisonniers. Afin de chasser encore les Français de leur camp retranché (Kassel) Ferdinand leur coupa aussi la communication avec Francfort. Le 1er septembre 1762 c'est la bataille de Johannisberg (nord de Franckfort, Bad-Nauheim) gagnée par Soubise et le Prince de Condé sur le Prince héréditaire de Brunswick. Les alliés perdirent dans cette journée, 2 400 hommes. Les armées françaises assiégèrent ensuite (20 septembre 1762) le château d'Amoenenbourg, sur l'Ohm car il fallait que le passage fut forcé si les Français voulaient sauver Kassel. Ce fut le prince Frédéric de Brunswick (frère de Ferdinand) qui fut chargé du siège de Kassel. Le 16 octobre 1762, on ouvre la tranchée. Le 1er novembre la garnison française est contrainte de se rendre suite à la famine. Deux jours après, furent signés les préliminaires de Fontainebleau qui mirent fin à la guerre entre la France et l'Angleterre et le traité définitif le 10 février 1763 (Traité de Paris). Le Sénat britannique adressa à Ferdinand des remerciements solennels et lui assigna pour le reste de ses jours une pension annuelle de 3000 livres-sterling. Le 15 février 1763 mit fin aux hostilités entre puissances continentales, à la misère générale. Ce jour là, la paix fut signée dans le château de Hubertsburg en Saxe.

La mort tragique de Joseph Coulon de Jumonville en 1754 à laquelle George Washington fut mêlé est un événement extrêmement important dans l'histoire du XVIIIème siècle. Horace Walpole s'en était bien rendu compte. Mais il existe, à mon avis, d'autres événements ultérieurs qui s'enchaînent :
1.
Trois mois après l'arrivée de Benjamin Franklin (secrétaire d'ambassade, ministre plénipotentiaire des États-Unis d'Amérique) à Paris, la Fayette s'embarque pour l'Amérique et le 1 août 1777 c'est la première rencontre de Lafayette avec George Washington lors d'un banquet donné par les autorités de Pennsylvanie.
2.
L'initiation de Voltaire (7 avril 1778) à la Loge des Neuf Soeurs détermina Franklin à se faire affilier. Sur la liste imprimée de 1779 Franklin vient un peu après celui de Voltaire. Franklin utilisa la Loge pour expliquer aux Français la révolution d'Amérique. Rappelons que Benjamin Franklin, maître général des Postes, avait travaillé pour les Britanniques en fournissant des transports  pour l'expédition contre le Fort Duquesne (bataille de la Monongahéla).  Le 6 février 1778, signature par la France d'un traité d'amitié avec les États-Unis d'Amérique qui cachait une alliance militaire afin d'effacer la honte du Traité de Paris de 1763.
3.
Enfin, la victoire de l'Amiral de Grasse dans le combat naval de la baie de Chesapeake en septembre 1781 et sa contribution à la victoire de Yorktown le 19 octobre 1781.

La victoire finale et la suprématie anglaise en Amérique du Nord est essentiellement due à sa supériorité navale dans l'Atlantique Nord. La prise de Québec en 1759 est l'exemple de son organisation (bâteaux-sondes, baliseurs, ravitailleurs, embarcations à fonds plat en prévision d'opérations amphibies, bâtiments à trois ponts, et surtout des officiers de marine professionnels hors pair : Charles Holmes, Philipp Durell, James Cook, George Anson, Charles Saunders).

Dans sa Galerie des aristocrates militaires et mémoires secrets, publié à Londres en 1790,  le général Dumouriez nous décrit un sombre tableau, bien peu reluisant de la France d'avant 1790. Il mentionne: "par-tout des succès malheureux, des anecdotes flétrissantes, des vues mal combinées, des projets sans soutien, ont été la production des cabales de cour, de la dissolution des moeurs nationales, de l'avidité des employés et des changements rapides des ministres. Chacun a cherché la richesse dans ces places glissantes et périlleuses, où la sûreté ni l'honneur ne résidoient pas". Dumouriez termine par cette phrase prémonitoire : "Tirons un voile sur ce tableau, qui est d'une dureté amère ; mais qui d'un jour à l'autre peut se retracer avec une ressemblance funeste, si le maître des empires ne tient pas tout prêt des événemens inattendus qui changent les causes ! ".

Dumouriez oublie Chesapeake et Yorktown - ce n'est pourtant pas des succès malheureux ! Dumouriez oublie également  que durant la guerre d'indépendance d'Amérique, la France était égale sur mer à l'Angleterre et supérieure par son armée, sa diplomatie. Elle plaça la France à un niveau élevé. A cette époque de gloire le seigneur du Biez siégeait toujours au Conseil des ministres. De même, Dumouriez ne semble pas connaître aussi les d'Estaing, Suffren, de Grasse, La Motte-Picquet ! Dumouriez a aussi prétendu que Soubise était devenu injuste et fier avec ses égaux, envieux des gens de mérite et dur envers ses inférieurs, qu'il s'est accoutumé à rendre coupables de ses propres sottises, dont il commençait par les rendre victimes.

Si jamais une Histoire pouvait mériter d'être répandue parmi toutes les classes de la nation allemande, ce serait assurément celle de cette guerre de Sept Ans qui fait tant d'honneur à l'Allemagne, et qui peut élever l'esprit de tout un peuple à un degré sublime

Résumer un tel sujet, en essayant de dire l'essentiel, sur une douzaine de pages, n'est pas un exercice facile. Il est certain que le prince de Soubise, fut un homme de grand courage et d'intelligence dans sa carrière militaire, brave, infatigable, exact sur la discipline, mais malheureusement, à mon avis, il manqua de fermeté et fit preuve de mollesse. Sa vie privée dissipée, licencieuse est le reflet de l'esprit d'insouciance et d'inconduite qui était la règle dans le monde de la cour de Louis XV. Le général de Piépape dans son  Histoire des Princes de Condé au XVIIIe siècle publié en 1911 a aussi écrit : « Le dix-huitième siècle se présente comme l’âge des abaissements. Esprits, cœurs, âmes, tout est rapetissé ou dévoyé. La religion, le patriotisme et les mœurs ont dégénéré. En politique, l’intérêt  particulier domine, et non le bien du peuple. » Alain Boulaire dans son ouvrage Les Rohan, publié aux Éditions France-Empire dit  que Soubise était un grand amateur de femmes, de filles et d'actrices : il entretenait mademoiselle Guimard "dans le luxe le plus élégant et le plus incroyable".  De plus, mademoiselle Zacharie âgée de 15 ans devint sa maîtresse alors qu'il en avait 69 !


Acte de baptême de Philippe Joseph Bourdon fils d'Antoine Joseph Bourdon garde de son altesse monseigneur le prince de Soubise seigneur de ce lieu et de Marie Anne Joseph Dewasme
(Archives de l'Etat à Tournai - Wiers, baptêmes, 21 novembre 1780)

Je crois qu'à l'époque où le prince de Soubise était seigneur du lieu (1724-1787), le village de Wiers était géré de façon efficace, sensée, responsable. On pouvait y trouver : Flescher et Baudy (baillis), Olivier et Fleurquin (greffiers), Defernez (sergent du prince), Roulez et Lepoint (curés), Bourdon et Leclercq (gardes et hommes de confiance du prince), Isidore Audeval (homme de fief sur plume), J.B.Beudin et Jean Philippe Quiévy (échevins), Théodore Bureau (mayeur). Nous retrouvons dans cette administration de Wiers les Audeval, Beudin, Defernez, Quiévy apparentés à Jean-Louis Fernig.

                                                                                                                    ( F I N )

                                                                                                                  Raymond V.M. BULION

                                                         25.07.2000



[1]Communication de Monsieur Denis Giguère, Archives Nationales du Québec, Centre d'Archives de la Capitale, 1210, avenue du Séminaire, CP10450 Sainte-Foy (Québec) G1V 4N1. Cette lettre est mentionnée ainsi que deux autres lettres du prince de Soubise dans "Etat général des archives publiques et privées du Québec", publié par le Ministère des Affaires cuturelles, 1968. 312 p. page 108

[2]Communication de Monsieur Claude Anspach Secrétaire général de l'Office Généalogique et Héraldique de Belgique. Numéro 49 du catalogue de la bibliothèque de l'O.G.H.B.

[3]Lorsque les nouvelles du désastre de Fontenoy atteignirent l'Angleterre, ce fut la plus grande indignation. Au camp de LESSINES le Brigadier Ingoldsby et le Capitaine Watts furent jugés par une cour martiale présidée par le Général Lord Dunmore. Auparavant, le 8 mai 1745 toujours au camp de Lessines les capitaines Townshend, Barrington, Monckton et le lieutenant-colonel Mostyn avaient été nommés aides-de-camp de Lord Dumore. A consulter : Charles Townshend.-The military life of Field-Marshal George, first Marquess Townshend,1724-1807. London, John Murray éditeur,1901. Contient des documents importants. D'après cet ouvrage, le carnet manuscrit d'instructions (order-book) de William Duke of Cumberland a été conservé. Cumberland  y mentionne le Camp Chateau Buffoel,  Baugnies, South Baugnies, descriptions des villages, etc... Intéressant aussi les notes concernant Fontenoy dans l'ouvrage de Michèle Forgel.-Les cérémonies de l'information dans la France du XVI au XVIII siècle.Paris, Fayard,1989. 496p. Pour annoncer une victoire, la royauté française avait un système de courriers, de Te Deum, de prêches d'évêques qui répercutait cette annonce un peu partout dans ses terres. (Renseignements fournis par Monsieur Luc Chaput, Ville Saint-Laurent, Québec, Canada).

[4]Appartient à une famille de Huguenot. Né à Castres en 1680, Jean Louis Ligonier, fils de Louis Ligonier, sieur de Monteuquet et de Louise du Poncet. Fut éduqué en France et en Suisse. Servi comme volontaire dans l'armée de Marlborough en 1702. Promu en 1706 major pour sa remarquable conduite à Menin. Gouverneur du Fort St-Philipp (Port-Mahon) de Minorque en 1719, Colonel du 7th Dragoons Guards en 1720, unité qu'il transforma en troupe d'élite, les célèbres "Ligoniers". Brigadier-général en 1736, il accompagne le roi George II lors de sa campagne d'Allemagne en 1743 et participe à la bataille de Dettingen, le 27 juin ou il est promu chevalier banneret sur le champ de bataille par le souverain britannique. A Fontenoy il commanda les Britush foot et participa avec les Britanniques et les Hanovriens à l'assaut de la position principale française entre Fontenoy et le bois de Barry.  Il fut fait prisonnier à Lawfeld (1747) par Louis XV qui le fit manger avec lui à sa table ! Le maréchal de Saxe présenta Ligonier à Louis XV en disant : "Sire, je présente à votre majesté un homme qui par une action glorieuse a contrarié tout mes projets" Louis XV complimenta Ligonier. Il l'employa ensuite comme intermédiaire dans les négociations de la Paix d'Aix-la-Chapelle (1748). En 1756 il fut dépossédé de son poste du Board d'Ordnance par une politique d'intrigue en faveur de Charles Spencer, 2e duc de Marlborough. Le roi George II consulta toujours Ligonier sur les questions militaires de préférence au commandant en chef Cumberland. Principal conseiller militaire de William Pitt. Lorsque Cumberland tomba en disgrace après la Convention de Closter-Seven Ligonier lui succéda comme commandant en chef des armées en Grande-Bretagne à partir du 24 oct. 1757 et eu une certaine responsablité dans l'administration des armées en Amérique, y compris la nomination des commandants. Maître général du Board of Ordnance. Enterré à l'Abbaye de Westminster. Voir: Pasteur Paul Romane-Musculus.-Généalogie de la famille de Ligonier. 38p. dactyl. Bibl.  de la Soc. de l'Histoire du Protestantisme français,Paris. - Rex Whitworth.-Field Marshal Lord Ligonier : a  story of the British army, 1702-1770. Oxford,1958. (Renseignements fournis par Monsieur Luc Chaput)

[5]A consulter aussi : Campbell-Maclachlan, William Augustus, Duke of Cumberland, (1876). Comprends des extraits de ses instructions en 1745-1747 en plus de nombreuses notes utiles. -  Campbell-Maclachlan, Order-book of William Augustus Duke of Cumberland. Southampton, 1876. 8 vol - Gentleman's Magazine.1745. Monthly intelligencer. Publié mensuellement de janvier 1731 à septembre 1907.

[6]Cet original est conservé aux Archives de l'Etat à Tournai  dans Inventaire des Archives du Biez, No 139.   

[7]Il est intéressant de noter que Napoléon n'avait pas une grande opinion du Maréchal de Saxe:- "Le Maréchal de Saxe fait voir comme la France était alors pauvre en bons généraux.Je ne lui connais que Lawfeld et Fontenoy. Un bon général n'est pas un homme commun. Saxe, Luxembourg sont de second ordre. Saxe n'était pas un aigle mais il avait du caractère et se faisait obéir."

Le plus grand témoignage de respect envers l'infanterie britannique à Fontenoy fut fait par le Maréchal de Saxe lui-même, dans une lettre publiée dans le Traité des Légions, 4ième édition, La Hague,1757:- "Je ne sais s'il y a beaucoup de nos généraux qui osassent entreprendre de passer une plaine avec un corps d'infanterie devant un corps de cavallerie nombreuse et se flatter de pouvoir se soutenir plusieurs heures avec quinze ou vingt bataillons au milieu d'une armée comme ont fait les Anglais à Fontenoy, sans qu'aucune charge de cavallerie les ait ébranlé ou fait dégarnir de leur feu. Ce sont des choses que nous avons tous vu, mais l'amour propre qu'on ne veut point en parler, parce  qu'on sait bien qu'on n'est point en état de les imiter."

[8]La Chenaye des Bois et Badier "Dictionnaire de la noblesse", Paris, édition Schlesinger, 1863-1876, 19 vol, in-4. T. 17, col.521.

[9]Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour. Favorite de Louis XV, née à Paris le 29 décembre 1721, fut mariée à l'amant de sa mère, Le Normand d'Etioles, sous-fermier général. D'une grande beauté, d'une distinction remarquable et de beaucoup d'esprit, elle fut bientôt entourée de riches seigneurs. Elle fit la connaissance de Louis XV après la mort de Mme de Châteauroux. Elle exerça sur Louis XV une influence néfaste, fit conclure en1759 le traité de Versailles, et couta près de 40 millions à la France. Elle mourut à Versailles en 1764. On peut dire que son influence a contribué à l'explosion révolutionnaire de la fin du XVIII e siècle.

[10]De son vrai nom Jeanne Bécu, elle était née à Vaucouleurs le 19 août 1743, fille naturelle d'un religieux de l'ordre de Picpus. Maitresse de Louis XV, épouse du comte de Barry, elle eut une grande influence sur le gouvernement. Avec sa faveur, la pornographie  politique franchit un nouveau degré. Cette légende ordurière de la favorite fut l'oeuvre du parti choiseuliste et parlementaire. Au moment de la Révolution, retirée à Lucienne (Seine-et-Oise), elle prit part aux tentatives de réaction, porta ses diamants aux émigrés en Angleterre et à son retour fut arrêtée et condamnée à mort en décembre 1793. Il fallut la porter sur l'échafaud.

[11]La Chenaye des Bois et Badier "Dictionnaire de la noblesse", tome 17, colonne 522

[12]Wiers-Sépultures-Acte du 8 janvier 1742 : Anno millesimo septingentesimo quadragesimo secundo mensis januari die  duodecima obiit franciscus leclercq custos silvarius magni principus de Soubiffe in Wiers septuaginta duorum annorum natus fepultus est die fequenti in nostro cemeterio. Deleau deservitor in Wiers.  Note: Custos silvarius=Garde des bois

Nous retrouverons dans un prochain article sur Les moulins de Brasménil les descendants de cette même famille Leclercq, originaire d'Harchies, alliée à la famille Dupriez, propriétaires du "Moulin TOUBACQUE" à Brasménil au siècle dernier..

[13]Wiers-Baptêmes-Acte du 21 novembre 1780 : L'an mil sept cent quatre vingt le vingt et un du mois de novembre à trois heures de relevée est né et deux heures après fut baptisé philippe joseph Bourdon, fils d'Antoine Joseph Bourdon, garde de Son altesse monseigneur le prince de Soubise Seigneur de ce lieu, de cette paroisse et de marie anne joseph Dewasmes native de la ville de Gand, fut parrein Louis Toussaint Noisier ; marraine Marie natalie Gosset tous deux de cette paroisse.

Cette branche de la famille Bourdon est toujours subsistante de nos jours et possède de nombreux descendants. Depuis longtemps nous essayons sans succès et malgré de nombreuses démarches de retrouver l'acte de baptême à Gand vers 1740 de Marie Anne Joseph Dewasmes. Celle-ci était la fille de Jean Baptiste Dewasmes, cavalier dans le Régiment de Dieudonné, marié à Péruwelz le 27 mai 1725 avec Catherine Françoise Flament. Antoine Jh Bourdon se maria avec Marie Anne Joseph Dewasmes à Péruwelz le 12 février 1760.

[14]Armand Louant, Les Hommes de fief sur plume créés à la Cour féodale de Hainaut de 1566 à 1794.Origine du notariat en Hainaut. Hombeek, Recueil 1 des Tablettes du Hainaut, 1959. 416 p.  p.32

[15]Wiers-Sépultures-Acte du 12 mars 1759 (Marie Valentine Defernez) et du 19 mai 1772 (Florent Defernez). Jacques Defernez natif de Grandglise épousa à Grandglise le 6 octobre 1739 Marie Augustine Crombin.

[16]Wiers était administrée par un bailli, nommé par le seigneur pour le représenter, défendre ses intérêts et sauvegarder ses droits.

[17]Georges Martin.,op.cit, p.171. Voir aussi: Michaud, Biographie Universelle ancienne et moderne ou Histoire, par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les Hommes qui se sont fait remarquer par leurs écrits, leurs talents, leurs vertus ou leurs crimes.Ouvrage entièrement rédigé par une société de gens de Lettres et de Savants. Paris, 1811-1862. 85 vol. C'est le plus merveilleux instrument de travail qui soit: indispensable au même titre que le Grand Larousse. Tous les articles sont signés, certains des plus grans noms de l'époque: B.Constant, Chateaubriant, Michelet, Balzac, Mérimée, Sainte-Beuve, etc..

[18]Aimable communication de M. Luc Chaput, Ville Saint-Laurent, Québec,Canada

[19]Modification personnelle. PINARD mentionne : "il y a commandé un camp"

[20]A ce sujet consulter : Anecdotes secrètes du règne de Louis XV ; porte-feuille d'un Petit-Maître, publ. par Roger de Parnes. Paris, 1882. 253p.  -  E.CAMPARDON, Madame de Pompadour et la Cour de Louis XV au milieu du dix-huitième siècle, Paris, Plon, 1867, 515p.  -  DU HAUSSET, Journal de la femme de chambre de Madame de Pompadour. Mélanges d'histoire, de littérature, etc...tirés d'un portefeuille (publ. par Quentin Craufurd) S.l. (Paris), 1809. 600p. (très rare édition originale des Mémoires de Madame du Hausset, publiés dans les mélanges Craufurd, tirés eux-mêmes à quelques dizaines d'exemplaires. C'est l'un des plus intéressants témoignages sur Madame de Pompadour).

[21]Kloster Zeven ou Closterseven (Basse-Saxe), près de Stade. C'est là que l'armée-hanovrienne du duc de Cumberland, battue par les Français à Hastenbeck (François Chevert décida de la victoire), renonça aux hostilités. Par la convention de Kloster Zeven (8 septembre .1757), Cumberland promit d'évacuer le Hanovre, mais il fut désavoué par son père, le roi George II. C'est à ce moment que Cumberland démissionna de ses charges militaires et fut remplacé par Ligonier qui devint Commandant en chef. Suite à la conversation entre Richelieu et Cumberland, celui-ci s'engagea à dissoudre une partie de son armée et à prendre ses quartiers d'hiver au-delà de l'Elbe, livrant Brême et Verden à l'occupation française. Le roi du Danemark à la requête de George II, avait envoyé le comte Lynar négocier entre les deux commandants. Cette capitulation devait permettre à Richelieu de se porter sur l'Elbe et d'y faire sa jonction avec le prince de Soubise. Une deuxième armée française était en campagne. Formée à la demande de Marie-Thérèse après la bataille de Prague et confiée à Soubise, elle avait débouché d'Alsace, remonté le Main et rallié à Würzbourg l'armée des Cercles qui s'y concentrait sous le commandement du prince de Saxe-Hildburghausen. Au sujet des guerres dans le Hanovre voir : Renouard Geschichte des Krieges in Hannover et Kausler Atlas der merkwürdigsten Schlachten

[22]Louis François Arnand de Vignerot du Plessis, premier gentilhomme de la chambre, maréchal de France.Il se distingua à Fontenoy, obtint la reddition du duc de Cumberland à Kloster Zeven (1757). Ami de Voltaire, il incarna le libertin du XVIIIe s. A consulter : P. D'Estrée, Le Maréchal de Richelieu (1696-1788), d'après les Mémoires Contemporains et des doc.inédits, Paris, 1917. 393p.

[23]Claude-Louis, comte de SAINT-GERMAIN.-Ministre de la guerre, né en 1707, au château de Vertamboz (Lons-le-Saulnier), fut élève des Jésuites et ensuite professeur, quitta la carrière de l'enseignement, se fit militaire, servit en Allemagne, rentra en France grâce au maréchal Maurice de Saxe, qui lui fit obtenir le commandement de la Basse-Alsace. Lieutenant-général renommé pour ses talents militaires, il fut chargé en 1756 de la défense de Dunkerque, puis il sauva l'armée française après la défaite de Rosbach Après bien des vicissitudes, il fut proposé par Turgot comme secrétaire d'État au ministère de la guerre. Installé, il corrigeau quelques abus, réprima quelques injustices, abolit la peine de mort contre les déserteurs. Il essaya d'introduire dans les régiments français la discipline allemande. Démissionna en 1777 et mourut en 1778. A consulter: Cte de SAINT-GERMAIN, Mémoires de M. le Comte de St Germain, Ministre et Secrétaire d'État de la guerre, Lieutenant-Général des Armées de France, Feld-Maréchal au service de S.-M,, le Roi de Danemark, Amsterdam, Rey, 1779. 306 p. (importants mémoires publiés par l'abbé Dubois).

[24]Georges Martin, op.cit., p.172

[25]Marc-Pierre de Voyer (1698-1764),comte d'Argenson, ministre de la Guerre. Ne pas confondre avec son frère René-Louis de Voyer (1694-1757), marquis d'Argenson, intendant à Valenciennes de 1720 à 1724, secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères. Enfants de Marc-René de Paulmy d'Argenson, lieutenant général de police de Paris, garde des Sceaux (Acad. fr.), chef du Conseil des Finances.

[26]Le titre de Ministre d'Etat était donné aux membres du Conseil d'En-haut et à eux seuls. Il n'avait aucune autre signification et était donc porté aussi bien par des hommes investis d'une charge ou fonction gouvernementale, que par d'autres dont tout le rôle n'était que d'entrer au Conseil pour y faire bénéficier le Roi de leurs lumières et de leur expérience. Le Conseil d'En-haut était par excellence et par nature celui des ministres d'Etat; l'usage voulait qu'ils siégeassent aussi au Conseil des Dépêches. On devenait ministre sur simple ordre verbal du Roi, exprimé de vive voix à l'intéressé ou transmis par un huissier du cabinet de Sa Majesté. Le Conseil d'En-haut,souvent nommé aussi "Conseil d'Etat" par les contemporains, était sous Louis XV le plus éminent, car on y délibérait de tous les principaux intérêts de l'Etat, c-à-d des affaires intérieures aussi bien qu'extérieures. A partir de 1730 il n'eut plus à connaître que de la diplomatie, des questions militaires et navales et, en temps de guerre, de la préparation des campagnes et de la conduite des opérations partageant la prépondérance avec le Conseil des Dépêches.

[27]Né en 1718, Victor de Broglie embrassa de bonne heure la carrière des armes et avait obtenu son baton de maréchal de 15 décembre 1759 pendant la guerre de Sept Ans. Il était gouverneur des Trois-Evêchés depuis 1764. Lorsque la cour eut comploté la dispersion des Etats généraux, Louis XVI confia au maréchal de Broglie le commandement de l'armée rassemblée sous Paris, avec le portefeuille de la guerre, mais la prise de la Bastille et le renvoi des ministres par Louis XVI laissèrent le maréchal sans portefeuille et sans armée. Il s'empressa de quitter la France. Il commanda les premiers corps d'émigrés qui ravagèrent la Champagne en 1792 et servit contre la France dans les rangs des coalisés. Mort à Munster en 1804.

[28]Louis Charles César Le Tellier, marquis d'Estrées, marquis de Courtenvaux, ministre d'Etat

[29]A ce sujet consulter :  Précis historique de la vie de Mad. la Comtesse du Barry avec son prtrait, Paris, 1775. 88 p. (violent pamphlet contre la ctesse Du Barry, resté anonyme)  -  Charles VATEL, Histoire de Madame du Barry d'après ses papiers personnels et les documents des archives publiques ; précédée d'une introduction sur Mme de Pompadour, le parc-aux-Cerfs et Melle de Romans, Versailles, L. Bernard, 1883. 3 vol (La meilleure étude sur Madame du Barry) - M.-F. PIDANSAT DE MAIROBERT,Anecdotes sur Mme du Barry, S.l. (Londres), 1775.436 p. (Nombreux documents scandaleux, sur la célèbre favorite, sa correspondance, sa généalogie, ...) -  Mémoires de la comtesse du Barri sur les événements qui se sont passés pendant les règnes de Louis XV et de Louis XV et sous la Révolution, Paris, Jean de Bonnot, 1967. 5 vol. Texte rendu public par E.-L. de Lamothe Langon.

 

[30]Marie Louise de Rohan-Soubise. Elle épousa le 15 juin 1736, Gaston-Jean-Baptiste-Charles de Lorraine, comte de Marsan, brigadier des armées du roi, fils de Charles-Louis de Lorraine, Prince de Ponse et comte de Marsan. La comtesse de Marsan fut nommée gouvernante des Enfants de France, après le décès de la duchesse de Tallard, sa tante.

[31]Georges Martin, op.cit., p.174

[32]Georges Martin, op.cit., p.174

[33]Jean François Georgel, Mémoires pour servir à l'histoire des événements de la fin du dix-huitième siècle depuis 1760 jusqu'en 1806-1810, par un correspondant impartial, publiés par M. Georgel, Paris, Alexis Eymery, 1817-1818. 6 vol. (édition rare bien complète de la grande planche en couleurs représentant en grandeur nature le fameux collier, à l'origine de l'affaire. Georgel (1731-1813), qui était alors secrétaire du cardinal de Rohan donne de précieux renseignements concernant cette affaire)

[34]Michel Antoine.-LOUIS XV. Paris, Fayard, 1989. p.929

[35]A consulter aussi: G.Bussière.- Henri Bertin et sa famille, Périgueux, 1926 - Albert Curmer.-Les seigneurs de Chatou. Versailles, 1919. Cet illuste personnage ne figure dans presque aucuns dictionnaires biographiques. - J'ai eu l'autorisation de visiter et de consulter les 18 et 19 février 1982 les importantes archives notariales de Chatou conservées avec le plus grand soin (salle souterraine bétonnée et climatisée) par les notaires associés C.Antin,J.-C Boutin et F.Colcanap, 1 Place Maurice Berteaux à Chatou. Tous ces personnages sont mentionnés dans de nombreux actes. Notons que Monsieur Réal, conseiller d'Etat, ancien procureur au Chatelet de Paris a collaboré au Code de Procédure avec Me Pigeau ancien clerc du Chatelet de Paris. Monsieur Réal a été choisi par Napoléon Ier comme rédacteur du projet du Code de Procédure. Homme d'une intelligence supérieure il exerca d'importantes fonctions sous le Ier Empire. Il est intéressant de noter que Monsieur Réal resta 12 ans aux Etats-Unis (1816-1828),"dans sa ferme et dans ses bois", sur les bords du Lac Ontario, à l'endroit appelé Cap Vincent .

[36]Monteynard était alors aussi gouverneur et lieutenant général de l'île de Corse.

[37]Selon l'historienne Marie-Magdeleine de Rasky (1977) ceux-ci furent échangés avec une quinzaine d'autres fonctionnaires et diplomates contre Madame Royale (fille de Louis XVI) le samedi 26 décembre 1795 à  minuit à L'Auberge du Corbeau à Huningue, localité française dans la banlieue de Bâle.  L'échange eu lieu exactement à la maison Reber en territoire helvétique.

[38]Parmentier servit d'abord comme pharmacien à l'armée du Hanovre de 1757 à 1763 (Connaissait-il Dumouriez et Charles de Rohan ? Des recherches sont actuellement en cours). Il mourut en 1813, profondément regretté de tous les amis de la science et de l'humanité. Chose certaine, Bertin , fondateur de la Société Nationale d'Agriculture en 1761, connaissait Parmentier. Nous en connaissons deux relations. Bertin connaissait aussi parfaitement Pierre François Réal. Bertin était son protecteur. Quant au père de Réal, c'était l'homme de confiance de Bertin. Chose certaine également , Dumouriez et Soubise étaient dans l'Armée du Hanovre et se connaissaient.

[39]Jules Renard, op.cit., p.62

[40]Jean Boulaine et Jean-Paul Legros, D'Olivier de Serres à René Dumont. Portraits d'agronomes. Paris, Lavoisier Université, 1998. 317p. p.39.  Jean Boulaine est membre de L'Académie d'Agriculture de France.

[41]Gabriel Sénac de Meilhan.-Littérateur, né à Paris en 1730, fils de Jean Baptiste Sénac premier médecin de Louis XV. Successivement maître des requêtes, intendant des provinces d'Aunis, de Provence et de Hainaut (à Valenciennes). Il devint, en 1776, intendant général de la guerre et des armées du roi. Ayant déplu aux troupes et au ministre Saint-Germain, on l'obligea à donner sa démission. A l'approche de la révolution, protégé par Vergennes, il brigua le poste de premier ministre, mais Marie Antoinette tenait pour Loménie de Brienne qui fut appelé au pouvoir. Meilhan émigra l'un des premiers, passa en Allemagne. Il mourut à Vienne en 1803. Il existe à Valenciennes l'Avenue Sénac-de-Meilhan.

[42]Arch.Etat Mons (AEM) ; Arch. seigneurie de Wiers. Les informations au sujet des habitants de Wiers soumis au droit de meilleur catel envers Charles de Rohan furent prises dans l'ouvrage de Léo VERRIEST, Le servage dans le comté de Hainaut.-Les sainteurs - le meilleur catel, (Prix Charles Duvivier, décerné par la Classe des lettres et des sciences morales et politiques dans la séance du 4 mai 1908), Académie Royale de Belgique, Mémoires. Deuxième série, tome VI. Bruxelles, Hayez, 1908. p.344, WIERS.

[43]Charles de Rohan possédait aussi la seigneurie de Préau à Harchies. En 1786 ce même Jean-François Flescher était bénéficiaire de la chapelle castrale de Préau. Jean-François Flescher était le fils d'Ignace Flescher (co-seigneur de Préau avec son cousin Robert-François Flescher) et de Marie Adam. Robert-François Flescher, bailli de Wiers en 1740-1773,avocat, subdélégué de Mgr l'Intendant de Flandres , prévôt de Saint-Amand, y mourut le 12 janvier 1773. Hubert Jh Baudy le rempace alors à Wiers. Au sujet des Flescher, consulter les publications du chanoine Cassart.

[44]Service Historique de l'Armée de terre-Ministère de la Défense-Château de Vincennes. Je tiens à remercier vivement le Colonel Bach, chef du SHAT ainsi que Philippe Schillinger conservateur en chef audit SHAT.  Ceux-ci ont effectués, à titre exceptionnel, des recherches nécessaires pour l'analyse de  cette correspondance.

[45]Régis de Metz, "La famille Prat-Desprez", Bulletin des Sociétés françaises de généalogie, d'héraldique et de sigillographie. Versailles, 1977. pp.95-6 -  Michel Antoine, Le gouvernement et l'administration sous le règne de Louis XV. Dictionnaire biographique, Paris, C.N.R.S., 1978

[46]Officier dans les troupes de la Marine, Dumas naquit à Montauban le 24 février 1721 et mourut célibataire à Albias (Tarn-et-Garonne) le 2 août 1794. Reçut en 1766 le commandement des îles de France (île Maurice) et de Bourbon (de la Réunion). Fait brigadier général des armées en 1768. Fut promu maréchal de camp le 1er mars 1780. Excellent officier rempli de bravoure, de talent et d'expérience, Dumas était en outre d'une scrupuleuse honnêteté. Antoine de Sartine, qui lors de l'Affaire du Canada en 1764 présida la Commission chargée de juger les malversations commises dans la colonie, reconnut que "partout où le sieur Dumas a commandé, les dépenses ont diminué de moitié le jour de son arrivée et qu'à son départ elles ont repris leur niveau".

[47]Le prince de Soubise avait ordonné le 9 avril 1762 la réunion dans la salle du conseil d'une conférence chaque semaine, au cours de laquelle ses intendants se communiqueraient le courant des affaires, la correspondance relative aux terres et les difficultés qui se présentaient dans l'administration de ses nombreux biens. Il existe certainement des renseignements intéressants sur sa terre de Wiers.

[48]Débuta sa carrière militaire en 1757 dans l'armée du Hanovre comme volontaire au régiment de cavalerie de François-Marie (de Perusse) des Cars, comte des Cars, maréchal de camps. Pris comme aide de camp par le comte d'Armentières, il passa ensuite à l'état-major de maréchal de Broglie et devint cornette de cavalerie (21 octobre 1758). Promu capitaine le 7 mars 1761, mis à la suite du régiment de Penthièvre-cavalerie le 1 janvier 1762, chevalier de Saint-Louis le 1 février 1763.

[49]Victoire française de Charles-Eugène-Gabriel de la Croix de Castries, marquis de Castries, sous les ordres du maréchal Victor-François de Broglie sur les troupes de Ferdinand de Brunswick. Les Français y auraient laissé, semble-t-il,  2,000 morts dont 150 officiers. Auparavant Castries avait servi sous Soubise à la bataille de Rosbach et de Lutzelberg et avait fait l'exploit de s'emparer de la forteresse de Rheinsfeld (1 décembre 1758) en face du fameux rocher de la Lorelei. Ce marquis de Castries se signala à Fontenoy.

[50]Baptisé à Paris (St-Séverin) le 4 janvier 1708, Anne François Dumouriez, écuyer, Sr du Périer, épousa à Paris (St-Sulpice) le 16 novembre 1733 Sophie Eléonore Ernestine Pâtissier de Châteauneuf, cousine du fameux lieutenant-général, commandant de l'armée française aux Indes, Charles Joseph Pâtissier, marquis de Bussy-Castelnau, marié à Mélanie-Artémise de Choiseul (fille d'Antoine-Nicolas de Choiseul, seigneur de Sommeville et de Renée Marie Michelle de Beauval). Ce mariage lui valut une charge de commissaire des guerres du département de Cambrai. Pendant douze ans, ses fonctions le firent résider à Cambrai. (Notre général Dumouriez avait donc un lien de parenté avec le ministre d'Etat, secrétaire d'Etat des Affaires Etrangères  et secrétaire d'Etat à la Guerre Etienne François de Stainville, duc de Choiseul. Selon Michel Antoine, auteur de Louis XV et tous les historiens le confirment le ministre Choiseul était mécréant, protégeait les philosophes, correspondait avec Voltaire et recevait chez lui tous les ennemis de la religion. Franc-Maçon, Choiseul supprima la Compagnie de Jésus et s'attaqua aux innombrables ordres religieux en France. On le dépeint habituellement comme un personnage exécrable. Anne François Dumouriez avait d'abord servi dans le régiment de Picardie. Commissaire ordonnateur du département de Paris, il mourut en avril 1769 près de Saint-Germain-en-Laye. Ayant un goût très vif pour la littérature, il publia en 1766, un poème Richardet, imité du Ricciardetto, de Forteguerri. A ce sujet, un grand merci à Charles Wirz, conservateur de l'Institut et Musée Voltaire à Genève pour nous avoir communiqué la lettre que Dumouriez à écrite à Voltaire le 8 avril 1766 et la réponse de celui-ci. L'édition de la Correspondance générale de Voltaire, tâche gigantesque, fut entreprise par Théodore Besterman, directeur de l'Institut Voltaire de Genève et comprend 107 volumes et 20.054 lettres. Théodore Besterman publia ensuite les Oeuvres complètes. Cette seconde Correspondance fut achevée en 1977, 51 volumes et plusieurs centaines de lettres nouvelles. Ces publications sont le résultat d'un travail considérable.

[51]Cité par Gilles Perrault, Le secret du Roi, Paris, Fayard, 1992, p.575. Il publia en 1990 l'ouvrage internationalement controversé Notre ami le Roi. Gilles Perrault resta cinq ans au barreau de Paris avant de se tourner vers l'écriture.

[52]Gilles Perrault, ibid., p.583

[53] C'est à cause du procès de l'implantation de la culture de la pomme de terre à Wiers en 1774 sous Soubise que j'ai jugé nécessaire de fournir quelques informations sur Parmentier en relation avec Soubise et Dumouriez. Il faut souligner le travail d'érudition, Parmentier d'Anne Muratori-Philip paru chez Plon en 1994, 401p.

[54]Louis-Charles-César Le Tellier (1695-1771), comte puis duc d'Estrées, petit-fils de Louvois et neveu du maréchal Victor-Marie d'Estrées. Maréchal de France le 24 février 1757, il fut ministre d'Etat en 1758. Présent à Fontenoy.

[55]Henry-Léonard Bertin  était protégé de Madame de Pompadour. Louis XV avait tellement confiance en lui qu'il lui avait confié la gestion de son argent personnel. Co-fondateur de l'école vétérinaire d'Alfort, Bertin se passionnait aussi pour l'agriculture.

[56]François-Prix Réal (1732-1810), père du Comte Réal. Le grand-père, François Réal (1698-1784), était meunier, boulanger et garde chasse à Chatou, marié à Marie Moreau.

[57]Anne Muratori-Philip, Parmentier,  p.90

[58]Voir : Louis Amiable, Une Loge maçonnique d'avant 1789. La Loge des Neuf Soeurs, Paris, Edimaf, 1989, 646 p.

[59]La plupart des études sur la guerre de Sept Ans en général laissent à désirer. Font exception cependant les ouvrages de Lee Kennett, The French armies in the Seven Years War : a study in military organization and administration , Durham, 1967. - André Corvisier, L'armée française de la fin du XVIIe siècle au ministère de Choiseul : le soldat, Publ. de la faculté des Lettres et des Sciences humaines de Paris, Série Recherches, XIV-XV, 2 vol. Paris, 1964. - R.P. Waddington, La guerre de Sept Ans ; histoire diplomatique et militaire, Paris, 1899-1907, 5 vol. - lea articles de William John Eccles et Charles Stacey (1974), Professeurs d'Histoire, Université de Toronto  

[60]L'action  menée par l'escadre de l'amiral de Grasse permit aux forces terrestres franco-américaines de Washington, La Fayette et Rochambeau de contraindre à la réddition la garnison anglaise du général Charles Cornwallis le 19 octobre 1781. Cet événement international de portée considérable mettra pratiquement fin aux combats et aboutira finalement à la signature, en 1783, du traité de Versailles reconnaissant l'indépendance des Etats-Unis d'Amérique. Le principal artisan de la victoire de Yorktown et de Chesapeake revint au ministre de la Marine, le marquis Charles-Eugène-Gabriel de la Croix de Castries (1727-1800) dont dépendaient les illustres amiraux français d'Estaing, de Suffren, de Grasse, La Motte-Picquet. C'est ce marquis de Castries qui s'était distingué à Fontenoy en 1745. C'est aussi ce marquis de Castries qui contresigna le 3 septembre 1783 le Traité de Versailles établissant l'indépendance des Etats-Unis. Il reçut également le 19 août 1785 la confession du Cardinal de Rohan au sujet de l'affaire du Collier dont le document  (Journal) a été conservé  (Chartrier de Castries A.N. 306 AP17).  Suite à cette affaire, Castries protesta vivement quand le roi avait décidé de chasser  le prince de Soubise du Conseil. Enfin Castries succéda à la mort du prince de Soubise au gouvernement de Flandres et du Hainaut à Lille (1787-1789). Le marquis de Castries mourut à Wolfenbütel le 11 janvier 1800. Ce fut le duc de Brunswick, ancien adversaire puis devenu ami fidèle qui assura  sa sépulture. Notons que deux mois après la bataille de Klosterkamp (1760), le général Dumouriez, blessé, entra en convalescence grâce aux soins de Charles-Ferdinand de Brunswick (son futur adversaire à Valmy) et après il fut transporté dans sa famille. Le Maréchal de Castries avait rendu visite vers 1786 à Dumouriez alors commandant de Cherbourg (c'est à Dumouriez que revint le mérite d'avoir créé ce grand port maritime de Cherbourg). Ce Duc de Brunswick, Charles-Ferdinand de Brunswick-Wolfenbüttel, marié à Augusta princesse royale de Hanovre, était un haut dignitaire de la Maçonnerie allemande.

[61]Edouard Boscawen (1711-1761), fils de Hugh Boscawen et de Charlotte Godfrey. Les Boscawen appartenaient à une vieille famille dont le nom provenait de leur lieu de résidence à Cornwall, Boscawen Ros ou la vallée des sureaux. Sa grand-mère maternelle était la célèbre soeur du duc de Malborough, Arabella Churchill. Son action remarquable durant le siège des forteresses espagnoles de Porto Bello (Panama) et de Carthagène (Colombie), motiva sa nomination comme commandant du Prince Frederick, de 60 canons. Le 4 février 1755, on le nommait vice-amiral de l'escadre bleue et on lui confiait le commandement d'une escadre en lui donnant l'ordre secret d'intercepter tous les renforts français "qui pouvaient gêner et compromettre la sécurité des colonies anglaises en Amérique". Arrivé à Halifax le 9 juillet 1755, il était inévitable qu'il jouât un rôle dans la déportation des Acadiens de la Nouvelle-Ecosse. Accompagné du contre-Amiral Savage Mostyn, Boscawen assista à l'assemblée du conseil du 28 juillet 1755 au cours de laquelle le gouverneur Charles Lawrence fit approver la déportation des habitants français de la Nouvelle-Ecosse. Après que la décision fut prise, la déportation des Acadiens tomba sous la responsabilité de l'armée et de la marine ;  Il fut promu vice-amiral de l'escadre blanche en 1756 et vice-amiral de l'escadre rouge l'année suivantee.  En 1757, il fut appelé à commander les forces navales chargées du blocus au large de Brest et fut fait commandant en second à l'arrivée de l'amiral Edouard Hawke (Voir Bataille des Cardinaux). En 1758, Boscawen fut désigné par Pitt pour prendre le commandement des forces navales réunies en vue de l'attaque contre Louisbourg. Il était promu amiral de l'escadre bleue le 8 février 1758 et s'embarquait pour la Nouvelle-Ecosse le 19 février. Sa participation à la prise de Louisbourg fut importante. Il élabora avec James Wolfe et Charles Lawrence le premier plan d'attaque, modifié par le commandant de l'armée Jeffery Amherst et prépara les troupes au débarquement. Ce fut par des opérations combinées de la marine et de l'armée qu'on réduisit la garnison française de Louisbourg.

[62]Ange Duquesne, gouverneur général de la Nouvelle-France, né à Toulon vers 1700, décédé à Antony (Hauts-de-Seine) le 17 sept.1778. Les Duquesne étaient marins, marchands et militaires. De noblesse normande, la famille était huguenote. Reconnu pour son dynamisme, il reçut, en 1746, le grade de major et le commandement du port de Toulon. A l'automne de 1751, la Cour, à la recherche d'un successeur pour La Jonquière, Gouverneur général de la Nouvelle-France, retint la candidature de Duquesne. Le roi lui demandait de veiller tout spécialement à assurer l'intégrité territoriale de l'Empire français d'Amérique.  Il devait, en particulier, chasser les marchands britanniques de la vallée de l'Ohio et pacifier les nations indiennes hostiles depuis la rébellion de 1747. Le ministre de la Marine Rouillé lui désigna Chouaguen (Oswego, New York) comme place à prendre si les Britanniques donnaient quelque raisons de représailles à la France. Duquesne débarqua à Québec, à la surprise générale, le 1er juillet 1752. En peu de temps, il s'attira l'animosité des coloniaux. Duquesne apprit pendant l'hiver de 1754-1755 que les Britanniques préparaient une riposte. Le ministre Machault l'avait prévenu du départ d'Edouard Braddock pour l'Amérique, à titre de commandant des forces armées. Duquesne prit donc les dispositions pour renforcer le fort Duquesne et les postes annexes. En 1755, Duquesne repassa en France outragé des critiques de Pierre Rigaud de Vaudreuil. En France il s'expliqua avec le ministre de la Marine qui  se montra satisfait, d'autant plus que Braddock venait d'être taillé en pièces. Duquesne reprit sa carrière active dans la marine. Défait au cours d'un engagement avec un escadron britannique commandé par Henry Osborn, Duquesne fut fait prisonnier et amené en Angleterre.

[63]Les éminents historiens américains Francis Parkman et Laurence Gipson se sont efforcés de justifier la conduite de Washington, de l'exonérer de l'accusation d'avoir assassiné Jumonville et de s'en être reconnu coupable. Les deux historiens interprètent mal certains faits évidents et ignorent d'autres faits pertinents (cités textuellement par le professeur William John Eccles dans le Dictionnaire biographique du Canada)

[64]A consulter : Journal manuscrit du capitaine Orme des Coldstream guards,aide de camp favori de Braddock (British Museum, No 212 King's MSS) - Un autre journal manuscrit d'un officier naval attaché aux forces de Braddock, appartenant au Révérend F.O. Morris du presbytère de Nunturnholme, Yorshire fut publié à Londres en 1854, sous le titre "An account of the Battle on the Monogahela River, from an original document by one of the survivors". Des copies de ces journaux ont été rassemblés avec une masse d'informations en provenance de sources américaines et françaises par Winthrop Sargent, dans une monographie exhaustive formant le vol. V des "Memoirs of the Historical Society of Pennsylvania", Philadelphie, 1856.   Voir aussi : Military affairs in North America, 1748-1765; selected documents from the Cumberland papers in Windsor Castle. Stanley McCrory Pargellis, New York / Londres, 1936. Reim., [Hamden, Conn.], 1969  -  C.F. Bouthillier, La bataille du 9 juillet 1755, Bulletin des recherches historiques, Lévis, 1908, XIV.

[65]Petit-fils de Philippe Liénard, chef du gobelet de la bouche du roi et de Catherine Gobert, remueuse (=berceuse) des enfants de France.

[66]Chevalier, seigneur de Kersaint, capitaine de vaisseau (1747), chef d'escadre (1756). Né au manoir de Kersaint près de Morlaix. Il épousa au Havre le 24 juin 1742, Jeanne-Marguerite-Armande Eustache. Famille originaire de Saint-Pol-de-Léon.

[67]Le 9 janvier 1759, sur la recommandation du célèbre commodore George Anson, on  confia à Saunders le commandement de la flotte qui devait remonter le Saint-Laurent. Un mois plus tard, promu vice-amiral de l'escadre bleue il avait sous ses ordres, comme commandant en second, le contre-amiral Philipp Durell et comme commandant en troisième, le contre-amiral Charles Holmes. Le major général Wolfe, commandant militaire de l'expédition rejoignit Saunders le 13 février 1759. Pitt avait bien averti les deux hommes que le succès de l'entreprise reposait sur "une entente parfaite entre les officiers de terre et de mer". Saunders avait pour instruction de "couvrir" l'armée afin de la protéger contre toute intervention de la marine française et de garder la maîtrise de la ligne de communication. Le gros de la flotte se mit en branle le 4 juin 1759. L'armada, la flotte de combat destinée à la prise de Québec se composait de 71 navires de guerre, dont 22 vaisseaux de ligne de 50 canons ou plus, 119 bâtiments de tranports, dont un bon nombre portaient des embarcations à fond plat en prévision d'opérations amphibies. Le 18 juin Saunders passa au large du Bic, à 170 milles en aval de Québec. Les problèmes de la navigation sur le fleuve, y compris le redoutable et sinueux passage de la Traverse en aval de l'île d'Orléans, furent bientôt surmontés par des capitaines d'expérience, tel James Cook et à compter du 14 juin, les navires marchands et les bâtiments de guerre de l'escadre de Durell défilèrent sans interruption dans le passage. Le 27 juin, Saunders couvrit le débarquement de Wolfe sur l'île d'Orléans. Le débarquement de Wolfe à l'anse au Foulon à l'aube du 13 septembre mettait en oeuvre des opérations amphibies d'une difficulté et d'une exigence peu communes. Il fallait dans le plus grand secret, faire redescendre le fleuve à 1800 hommes de troupe à bord d'embarcations, sur une distance de moins de 10 milles depuis Cap-Rouge, et aborder à un point précis en tenant compte des courants, des tourbillons et des marées. Les embarcations touchaient terre à peu près à l'endroit prévu, et l'effet de surprise fut total. Le 17 septembre 1759, Saunders amena sept des vaisseaux de ligne à portée de canon de la basse ville pour agir de concert avec l'armée. Lorsque la garnison capitula le lendemain matin, Saunders et George Townshend signèrent conjointement l'acte de reddition au nom de la Grande-Bretagne. Les dépêches de Saunders et Townshend annonçant la chute de Québec parvinrent à Londres le 16 octobre. Nommé en 1770 amiral de l'escadre bleue, il mourut en 1775 et  fut inhumé dans l'abbaye de Westminster.

[68]John Campbell, 4e comte de Loudoun, gouverneur général de la Virginie et commandant en chef des forces anglaises en Amérique après la défaite désastreuse de Braddock, neveu de James Campbell mort au château de Briffoeil.

[69]Voltaire, Précis du siècle de Louis XV, "Oeuvres complètes", 92 vol., in-12, S.l. Kehl (Allemagne), 1785-1789. XXII. L'édition de Kehl constitue l'ensemble le plus exact et le plus complet des oeuvres de Voltaire paru au XVIIIe siècle et servit de base à toutes les éditions du XIXe siècle.  -  Julian Gwyn, Dictionnaire Biographique du Canada, tome III, p.304.

[70] Charles Townshend, The military life of Field-Marshal George, first Marquess Townshend,1724-1807. London, John Murray éditeur,1901.

[71]Deux ouvrages rares ont été retrouvés au sujet de la guerre de Sept Ans en Allemagne : Il s'agit de Histoire de la guerre de Sept Ans en Allemagne de 1756 à 1763  par Johann Wilhelm d'Archenholtz. Traduit de l'allemand par Mr d'Arnex, Berne, E.Hallet, 1789. 367 p. + carte et The operations of the allied army, under the command of Prince Ferdinand, duke of Brunswick and Luneberg, during the greatest part of six campaigns, beginning in the year 1757, and ending in the year 1762 by an officer, who served in the British forces : illustrated with maps and plans, London,, T.Jefferys, 1764. In-4


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